Réponses aux demandes d'information

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29 mars 2023

COD201411.EF

République démocratique du Congo : information sur la situation des défenseurs des droits de la personne et le traitement que leur réservent les autorités; la protection offerte par l’État (2021-mars 2023)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Situation des défenseurs des droits de la personne

Selon Amnesty International, les défenseurs des droits de la personne et les journalistes sont [version française d’Amnesty International] « la cible d’agressions et de menaces », et les rassemblements et manifestations « jugé[s] critiques à l’égard du régime » sont interdits ou « violemment réprimés » (2022-03-29, 145). Dans son rapport annuel sur les événements de 2021, Human Rights Watch (HRW) fait observer que [version française de HRW] « [d]es journalistes, des activistes, des lanceurs d’alerte et des détracteurs des politiques gouvernementales ont été intimidés et menacés, passés à tabac, arrêtés et dans certains cas poursuivis en justice par les autorités et les forces de sécurité » (2022-01-13). Le Centre international pour le droit à but non lucratif (International Center for Not-for-Profit Law – ICNL), une organisation qui se préoccupe de l’environnement juridique pour la société civile (ICNL s.d.), fait observer que le gouvernement a [traduction] « réprimé » les critiques en [traduction] « "faisant disparaître" des journalistes et en empêchant des manifestations de l’opposition » (2022-12-23). De plus, au cours de 83 entretiens menés avec des victimes de violence, des avocats, des militants et des journalistes en 2020, HRW a recensé 109 cas [version française de HRW] « d’arrestations arbitraires et de harcèlement », dont « au moins 16 cas » dans lesquels l’Agence nationale de renseignements (ANR) était impliquée (2021-01-28). Selon la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, du 1er juin 2020 au 31 mai 2021, il y a eu de [version française des Nations Unies] « nombreux » cas « de menaces, d’intimidations et d’attaques » à l’endroit de défenseurs des droits de la personne, de membres de la société civile et de journalistes; 433 personnes ont fait l’objet « d’arrestations arbitraires ou de détentions illégales et arbitraires lors de l’exercice par celles-ci de leur droit à la liberté d’opinion et d’expression, de réunion pacifique ou d’association » (Nations Unies 2021-07-15, paragr. 1.10). De même, Amnesty International signale que des défenseurs des droits de la personne et des lanceurs d’alerte ont été [version française d’Amnesty International] « attaqués et menacés par les institutions publiques » et que « [d]es dizaines de militant·e·s en faveur de la démocratie et contre la corruption, de défenseur·e·s de l’environnement, de syndicalistes et de défenseur·e·s des droits des peuples autochtones ont été arrêtés arbitrairement, harcelés, voire condamnés par des tribunaux à l’issue de procès iniques » (2022-03-29, 148). Le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH), qui se compose de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), fait aussi observer que le travail des Nations Unies et des organisations humanitaires est [version française des Nations Unies] « gravement » entravé par les menaces, les messages de haine et « la propagation de fausses nouvelles », « souvent à l’instigation des hommes politiques et opérateurs économiques » (Nations Unies 2021-06, paragr. 53). Selon HRW, un humoriste a été arrêté le 10 février 2023 en raison d’une vidéo qu’il a publiée sur les médias sociaux, qui était considérée comme insultante pour le président, et plus d’une semaine après son arrestation, l’humoriste n’avait toujours pas reçu d’aide juridique ni été amené devant une autorité judiciaire compétente; HRW précise que ce cas reflète [version française de HRW] « le climat d’intolérance croissante à l’égard des voix dissidentes en RD Congo, avec des attaques visant des journalistes, activistes, critiques du gouvernement et manifestants pacifiques » (2023-02-27).

1.1 Traitement réservé par les forces de sécurité

Dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2022 publiés par le Département d’État des États-Unis, on peut lire que des militants, des journalistes et des membres de l’opposition politique ont été arrêtés et détenus par les forces de sécurité de l’État, et que les manifestants et les militants étaient [traduction] « régulièrement » détenus pendant « de longues périodes » sans avoir été accusés (É.-U. 2023-03-20, 10). Les Country Reports 2021 publiés par les États-Unis précisent que les lieux où se trouvaient les militants arrêtés sont demeurés [traduction] « inconnus pendant de longues périodes » (É.-U. 2022-04-12, 5). Il est également écrit ceci dans les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis :

[traduction]

[d]es éléments des forces de sécurité de l’État ont continué de tuer, de harceler, d’agresser, d’intimider et d’arrêter et de détenir arbitrairement des défenseurs nationaux des droits de la personne et des travailleurs d’ONG nationales, en particulier lorsque les ONG publiaient des rapports sur les victimes des exactions commises par les forces de sécurité de l’État, soutenaient les victimes de ces exactions, ou publiaient des informations sur l’exploitation illicite des ressources naturelles (É.-U. 2023-03-20, 33).

De plus, on peut lire dans les Country Reports 2020 publiés par les États-Unis que le ministère des Droits humains a fait des déclarations publiques condamnant les arrestations arbitraires de journalistes et de défenseurs des droits de la personne (É.-U. 2021-03-30, sect. 5). Citant les Nations Unies, la même source souligne que, [traduction] « en date du 30 juin [2020], les forces de sécurité avaient arrêté de manière arbitraire au moins 1 327 personnes dans le pays, contre 2 947 au cours de la même période en 2019 » (É.-U. 2021-03-30, sect. 1D). Le rapport ajoute aussi que des défenseurs des droits de la personne ont continué à être [version française des États-Unis] « arrêtés et détenus de manière arbitraire, sans procès public et équitable », et cite l’exemple d’un militant arrêté pour « "outrage à un membre du gouvernement" » le 20 janvier, qui est resté en détention jusqu’à son procès, le 7 juillet; en détention, il a été agressé et est tombé « gravement malade » en raison des conditions carcérales (É.-U. 2021-03-30, sect. 1D). Selon la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, les corps de trois militants présentant des [version française des Nations Unies] « signes de torture » ont été retrouvés dans une rivière en juillet 2020, après qu’un des individus eut été vu pour la dernière fois en détention (Nations Unies 2021-07-15, paragr. 9).

1.2 Traitement réservé aux manifestants

Selon Amnesty International, les rassemblements et les manifestations sont interdits, et les forces de sécurité [version française d’Amnesty International] « ont violemment réprimé » ceux qui ont eu lieu (2022-03-29, 147). Un rapport du Bureau des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement (Foreign, Commonwealth & Development Office) du Royaume-Uni fait état de [traduction] « restrictions du droit de manifester pacifiquement et d’un renforcement de la censure des médias politiques et des militants », et précise que les personnes qui critiquent le gouvernement s’exposent à des arrestations et à de [traduction] « longues » peines de prison sans procès équitable (R.-U. 2022-12, 49). Des sources signalent que l’état de siège a été proclamé dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu en mai 2021 (R.-U. 2022-12, 49; Allemagne 2022-04-25, 3); un porte-parole du gouvernement a déclaré que l’objectif était de [version française de HRW] « "mettre rapidement fin à l’insécurité qui, tous les jours, fait des morts parmi nos compatriotes" », en substituant l’armée aux autorités civiles (HRW 2022-03-22). Selon l’Office fédéral des migrations et des réfugiés (Bundesamt für Migration und Flüchtlinge – BAMF) de l’Allemagne, le 13 avril 2022, 37 organisations de la société civile et ONG ont diffusé une déclaration disant que, pendant la période d’état de siège, les détracteurs du gouvernement font l’objet [traduction] « d’arrestations arbitraires, de persécution, de violence physique et d’intimidation », et que la police et les forces de sécurité ont recours à la « force excessive » à l’endroit des manifestants (Allemagne 2022-04-25, 3). La même source signale aussi que, selon un communiqué de presse paru en avril 2022, le chef du parti d’opposition Engagement pour la citoyenneté et le développement (ECIDÉ) a critiqué le [traduction] « mépris » des droits de la personne et les arrestations de défenseurs des droits de la personne, de journalistes et de militants dans la province de l’Équateur, dans le Nord-Ouest du pays (Allemagne 2022-04-25, 2). D’après HRW, l’armée et la police ont employé une [version française de HRW] « force létale » contre des manifestants, et que des militants, des journalistes et des membres de l’opposition politique ont été « arbitrairement arrêté[s] et poursuivi[s] en justice » (2022-03-22). Selon Amnesty International, toute personne qui remet en question l’état de siège est [version française d’Amnesty International] « prise pour cible »; lors d’une manifestation, les forces de sécurité ont tué deux militants et en ont blessé, détenu et poursuivi « des dizaines » d’autres (2022-05-10, 15, 13).

L’organisation Freedom House signale que la [traduction] « force excessive » a été employée contre les militants, les étudiants et les civils qui ont pris part à des marches et à des manifestations tout au long de 2021; ils ont été détenus arbitrairement, battus et dispersés de force par des moyens tels que des gaz lacrymogènes (2022-02-24, sect. E1). Selon Front Line Defenders (FLD), une organisation internationale vouée à la protection des défenseurs des droits de la personne (FLD s.d.a), en janvier 2021, une membre de SOS HANDICAP, une organisation fondée par des femmes ayant un handicap afin de protéger les droits fondamentaux des femmes et des filles ayant un handicap, a été arrêtée pour avoir planifié une marche contre la discrimination et détenue par la police pendant quatre jours sans être amenée devant un juge, après quoi elle a été remise en liberté en raison de problèmes de santé causés par des blessures subies pendant l’arrestation (2021-01-26). L’organisation HRW fait observer que, en avril 2021, 5 personnes ont été tuées par les forces de sécurité, et [version française de HRW] « au moins » 8 autres ont été blessées lors de manifestations à Goma, à Butembo et en territoire de Beni; de plus, « les forces de sécurité et des bandes violentes » ont tué « au moins » 10 personnes et en ont blessé 50 autres en territoire de Nyiragongo, au Nord-Kivu (2022-01-13). Selon des sources, lors d’une occupation par des manifestants au parlement de Kinshasa en avril 2022, la police a eu recours à la force pour mettre fin à la manifestation (Allemagne 2022-04-25, 2; HRW 2023-01-12) et a blessé [version française de HRW] « au moins » 20 (HRW 2023-01-12) ou 30 manifestants (Allemagne 2022-04-25, 2). Amnesty International signale qu’un défenseur des droits de la personne est décédé en octobre 2021 lorsque, selon ses collègues, des soldats l’ont battu et jeté par une fenêtre (2022-05-10, 15). D’après Amnesty International, le jour où un autre manifestant a été tué à Beni, le maire avait fait la déclaration suivante dans les médias : [version française d’Amnesty International] « "Nous avons un principe : le chien aboie, la caravane ne peut pas passer. On arrête la caravane et on tue ce chien. Voici les chiens en question qui font du bruit ici dans la ville. Nous ne pouvons pas tolérer une telle absurdité" » (2022-05-10, 15). Le même jour, le commandant de la police de Beni avait aussi déclaré ceci :

[version française d’Amnesty International]

« Toute personne qui va quitter sa maison pour aller faire des bêtises devrait d’abord regarder les photos de sa femme, de ses frères, de ses sœurs, de ses enfants. S’ils vont manifester, auront-ils la chance de rentrer chez eux et de revoir les visages de leurs frères et sœurs? Quand ils sortent de chez eux en disant qu’ils sont au-dessus de la loi, malheur à eux, ils ne verront plus leurs frères ou leurs sœurs » (Amnesty International 2022-05-10, 15).

Le BCNUDH a signalé qu'en avril 2021, pendant une manifestation pour réclamer le départ de la MONUSCO, la police a fait un usage [version française des Nations Unies] « excessif » de la force, et des manifestants ont été battus et détenus (Nations Unies 2021-06, paragr. 52). Dans les Country Reports 2020 publiés par les États-Unis, on peut lire que trois membres du mouvement citoyen Filimbi ont été arrêtés à la suite d’une manifestation et [traduction] « torturés » par la police pendant leur détention (É.-U. 2021-03-30, sect. 1C). Des sources signalent que le chef de la ligue des jeunes du parti politique Ensemble pour la République s’est fait arrêter en juillet 2021 (RFI 2021-07-19; Politico 2021-07-20; HRW 2021-07-22) pour avoir exprimé ouvertement son opposition à un projet de loi prévoyant que seules les personnes nées de père et de mère congolais auraient accès à la fonction présidentielle (Politico 2021-07-20; HRW 2021-07-22). D’après Radio France internationale (RFI), avant que le chef de la ligue des jeunes soit arrêté, deux de ses collègues ont été arrêtés et « torturés », puis ont été relâchés (2021-07-19). Des sources signalent que le chef de la ligue des jeunes d’Ensemble pour la République a été condamné à deux ans de prison pour [version française de HRW] « incitation à la désobéissance civile » (HRW 2021-07-22; Politico 2021-07-20) ainsi qu’à une amende de 500 000 francs congolais (CDF) [332 $CAN] (Politico 2021-07-20).

1.2.1 Traitement réservé aux membres de la Lutte pour le changement (Lucha)

La Lucha se définit comme étant « un mouvement citoyen congolais non-partisan & non-violent [sic] » qui vise à mobiliser les citoyens dans la lutte pour la dignité humaine et la justice sociale (s.d.). D’après les Country Reports 2021 publiés par les États-Unis, lors d’une manifestation pour réclamer la réouverture des écoles à la suite de la COVID-19, des manifestants de la Lucha ont été fouettés, 17 ont été blessés, et 21 ont été arrêtés et relâchés trois heures plus tard (É.-U. 2022-04-12, 28). Selon des sources, à une manifestation tenue en novembre 2021 pour protester contre l’état de siège, 13 militants de la Lucha ont été arrêtés (Radio Okapi 2021-11-11; Amnesty International 2022-03-29, 147; HRW 2022-01-13). Des sources signalent que, en avril 2022, un tribunal militaire a condamné 12 de ces militants à un an de prison (Amnesty International 2022-04-01; HRW 2022-04-07), et que la treizième militante n’a pas été condamnée, puisqu’elle est demeurée à l’hôpital en raison de [version française de HRW] « complications » des suites de ses blessures à la tête (HRW 2022-04-07). Amnesty International souligne que, en août 2021, la Lucha a appelé à des [version française d’Amnesty International] « villes mortes » [1] pour protester contre les meurtres commis à Beni (2022-05-10, 13). Selon un article du site d’actualités congolais Actualite.cd, des commerçants ont affirmé qu’ils avaient refusé d’ouvrir leur boutique non pas pour appuyer la Lucha, mais par crainte de tensions (2021-08-18). Des sources signalent que huit militants de la Lucha ont été arrêtés à Beni le 19 décembre 2020, lors d’une manifestation visant à critiquer une mission de maintien de la paix des Nations Unies en République démocratique du Congo (RDC) (Amnesty International 2021-01-19; HRW 2021-01-21). Selon HRW, les militants ont été violentés par la police quand ils étaient en garde à vue, et ont été accusés de [version française de HRW] « "violences à sentinelle" et "sabotage" »; le gouvernement réclamait une peine de dix ans de prison, mais les militants ont été acquittés après avoir passé un mois en détention (2021-01-21). Selon des sources, deux militants de la Lucha ont été arrêtés lors d’une manifestation contre la MONUSCO à Butembo en avril 2021; ils ont été accusés d’ « "incitation à la désobéissance civile" » et de « "menaces d’attentat" » (Actualite.cd 2021-07-25; HRW 2021-07-19) et étaient passibles de cinq ans de prison (HRW 2021-07-19). Actualite.cd précise qu’ils ont passé trois mois dans « des conditions hygiéniques déplorables » avant d’être libérés (2021-07-25). D’après HRW, deux militants de la Lucha ont été détenus arbitrairement par suite d’allégations [faites par la Lucha (2022-01-13)] de détournement d’aide humanitaire par le personnel d’une fondation créée par l’épouse du président de la RDC (HRW 2022-01-13; Amnesty International 2022-03-29, 147). L’organisation HRW ajoute que ces deux militants ont été arrêtés en juillet et en août 2021 respectivement, et qu’ils ont été libérés sous caution en novembre 2021 et accusés de [version française de HRW] « diffamation et association de malfaiteurs » (2022-01-13). Un autre article de HRW précise aussi que l’un de ces deux militants risque la peine de mort et pourrait être condamné à perpétuité (2021-10-06).

Selon des sources, un policier a abattu par balles un militant de la Lucha en mai 2020, lors d’une manifestation à laquelle participaient 20 personnes (FIDH 2020-05-26; É.-U. 2021-03-30, sect. 1A); un tribunal militaire a déclaré le policier coupable de meurtre et l’a condamné à la prison à perpétuité (É.-U. 2021-03-30, sect. 1A). Des sources signalent qu’un militant de la Lucha a été amputé d’une jambe en septembre 2021 en raison d’un coup de feu tiré par un policier pendant une manifestation à Beni (Amnesty International 2022-05-10, 14; Lucha 2022-01-24). La Lucha signale aussi que, en janvier 2022, un de ses militants est décédé des suites de blessures par balles infligées par les forces de sécurité à Beni, et qu’il s’agissait du troisième meurtre d’un militant de la Lucha à Beni en trois ans (2022-01-24). D’après HRW, 12 militants de Butembo qui se rendaient à Beni pour assister aux obsèques du militant de la Lucha ont été arrêtés, puis relâchés après deux jours de détention (2022-03-22).

Pour des renseignements additionnels sur le traitement réservé aux militants pour la démocratie, y compris ceux de la Lucha et du mouvement Filimbi, veuillez consulter la réponse à la demande d’information COD200925 publiée en mars 2023.

1.3 Traitement réservé aux journalistes

Selon Amnesty International, [en 2021,] [version française d’Amnesty International] « [a]u moins » 11 journalistes ont été arrêtés arbitrairement pendant qu’ils faisaient leur travail, et « [p]lusieurs » ont été menacés ou intimidés par des agents de l’État et des dirigeants politiques (2022-03-29, 148). Dans les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, on peut lire que, au cours des six premiers mois de 2022, le BCNUDH a recensé 43 cas de violations de la liberté d’opinion et d’expression commises à l’endroit de journalistes et de défenseurs des droits de la personne (É.-U. 2023-03-20, 19). Selon un reportage de Journaliste en danger (JED), une organisation indépendante et non partisane de la RDC vouée à la promotion et à la défense de la liberté de presse (JED s.d.), on compte 124 cas d’attaques contre des journalistes en 2022, soit :

  • 49 journalistes menacés
  • 37 journalistes arr[êtés]
  • 18 journalistes agressés
  • 17 radios ou émissions interdites
  • 2 journalistes enlevés
  • 1 journaliste tué (2022-11-02, 5-6).

JED a fait état de 110 cas d’agressions commises contre des journalistes en 2021 (2021-11-01). Selon le BAMF, en avril 2022, un journaliste du Nord-Kivu s’est fait arrêter en raison d’un reportage (Allemagne 2022-04-25, 3). La même source signale aussi dans un autre rapport que deux rédacteurs en chef de stations de radio à Lomami ont été arrêtés en janvier 2023 et accusés de diffamation (Allemagne 2023-01-09, 3).

Selon Reporters sans frontières (RSF), le directeur d’une station de radio locale et deux journalistes ont été arrêtés à Sankuru en août 2020 et [version française de RSF] « torturés pendant leur incarcération », et le directeur de la station de radio a de nouveau été arrêté en septembre, à la suite d’une « plainte » du gouverneur de Sankuru (2020-09-18). RSF signale que, en octobre 2020, la rédactrice en chef d’une station de radio communautaire de Goma a dû se cacher après avoir appris que des généraux des forces armées avaient proféré des menaces contre elle en raison de questions qu’elle avait posées au président à l’occasion d’une conférence de presse (2020-10-14). De plus, RSF signale qu'en mai 2022, trois journalistes ont été [version française de RSF] « torturés » par l’ANR pour avoir pris part à une émission de radio dans laquelle ils avaient discuté des irrégularités dans la tenue des épreuves du baccalauréat [fin du secondaire] (2022-05-23). La Fédération internationale des journalistes (FIJ), une organisation représentant [version française de la FIJ] « 600 000 professionnels des médias » dans « plus de 140 pays », qui « promeut l’action collective pour défendre les droits de l’homme, la démocratie et le pluralisme des médias » (FIJ s.d.), signale que, en août 2021, un journaliste de la Radio-télévision nationale congolaise (RTNC) qui animait une émission encourageant les jeunes à promouvoir la paix a été tué par des assaillants inconnus (2021-08-12). Selon des sources, le directeur de la radio communautaire Babombi et son épouse ont été agressés et tués dans la province de l’Ituri en août 2021 (JED 2021-08-14; CPJ s.d.). Des sources précisent que les miliciens de la milice locale Mai-Mai étaient soupçonnés d’avoir commis l’agression, puisque le directeur avait reçu des menaces après avoir animé un segment d’émission portant sur les activités du groupe armé (FIJ 2021-08-17; CPJ s.d.).

2. Lois protégeant les défenseurs des droits de la personne

Selon des sources, le projet de loi sur la protection des défenseurs des droits de la personne, déposé en 2017, n’a pas progressé (FLD s.d.b; Amnesty International 2022-03-29, 148; FIDH 2022-06-07, 25). La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) souligne que le projet de loi contient [version française de la FIDH] « des dispositions inquiétantes risquant d’entraver les activités légitimes et pacifiques des défenseur·e·s et menaçant la reconnaissance de leur statut » (FIDH 2022-06-07, 25). L’organisation FLD fait observer que le projet de loi comprend des dispositions qui constituent une [version française de FLD] « menace » pour le travail des défenseurs des droits de la personne, et qui leur imposent des conditions comme l’obligation d’envoyer des rapports de leurs activités au ministère des Droits humains (s.d.b).

Selon l’ICNL, trois projets de loi qui constituent une [traduction] « menace à l’espace civique » ont été déposés en mai 2018, à savoir les suivants : un projet de loi sur les défenseurs des droits de la personne qui obligera ces défenseurs et tout autre individu travaillant en faveur des droits de la personne à s’enregistrer auprès des autorités; un projet de loi sur les ONG « semblable à d’autres projets de loi dans le monde qui imposent des restrictions aux ONG », et « un projet de loi sur le financement de la lutte contre le terrorisme qui cible aussi la société civile »; cependant, en date de décembre 2022, aucun progrès récent n’avait été accompli relativement à ces projets de loi (2022-12-23). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé de renseignements additionnels sur le contenu de ces lois.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Note

[1] Selon Amnesty International,

[version française d’Amnesty International]

En RDC, les « villes mortes » sont une forme de désobéissance civile consistant en un blocus général de la ville, du village ou de la localité (avec fermeture des écoles et des marchés, arrêt des principales activités commerciales, sociales et des transports publics) pour faire valoir une revendication ou une dénonciation (2022-05-10, 13).

Références

Actualite.cd. 2021-08-18. Claude Sengenya. « RDC-Butembo : un OPJ arrêté pour avoir convoqué des commerçants qui ont hésité d'ouvrir leurs boutiques à la suite d'un appel à manifestation contre l'état de siège ». [Date de consultation : 2023-03-06]

Actualite.cd. 2021-07-25. Claude Sengenya. « RDC : deux militants de la Lucha libérés après trois mois de détention à Butembo ». [Date de consultation : 2023-03-27]

Allemagne. 2023-01-09. Bundesamt für Migration und Flüchtlinge (BAMF). Briefing Notes: Group 62 – Information Centre for Asylum and Migration. [Date de consultation : 2023-03-07]

Allemagne. 2022-04-25. Bundesamt für Migration und Flüchtlinge (BAMF). Briefing Notes: Group 62 – Information Centre for Asylum and Migration. [Date de consultation : 2023-03-07]

Amnesty International. 2022-05-10. DRC: Justice and Freedoms Under Siege in North-Kivu and Ituri. [Date de consultation : 2023-03-03]

Amnesty International. 2022-04-01. « DRC: Conviction of 12 Youth Activists Is a Shameful Act to Suppress Dissent ». [Date de consultation : 2023-03-06]

Amnesty International. 2022-03-29. « Democratic Republic of the Congo ». Amnesty International Report 2021/22: The State of the World’s Human Rights. [Date de consultation : 2023-02-27]

Amnesty International. 2021-01-19. « DRC: Authorities Must Immediately and Unconditionally Release 10 Youth Activists ». [Date de consultation : 2023-03-08]

Committee to Protect Journalists (CPJ). S.d. « Joël Mumbere Musavuli ». [Date de consultation : 2023-03-08]

États-Unis (É.-U.). 2023-03-20. Department of State. « Democratic Republic of the Congo ». Country Reports on Human Rights Practices for 2022. [Date de consultation : 2023-03-23]

États-Unis (É.-U.). 2022-04-12. Department of State. « Democratic Republic of the Congo ». Country Reports on Human Rights Practices for 2021. [Date de consultation : 2023-02-22]

États-Unis (É.-U.). 2021-03-30. Department of State. « Democratic Republic of the Congo ». Country Reports on Human Rights Practices for 2020. [Date de consultation : 2023-03-09]

Fédération internationale des journalistes (FIJ). 2021-08-17. « DRC: Journalist and Wife Stabbed to Death ». [Date de consultation : 2023-03-07]

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Fédération internationale pour les droits humains (FIDH). 2020-05-26. « RDC : meurtre du militant de la LUCHA Freddy Kambale ». [Date de consultation : 2023-03-08]

Freedom House. 2022-02-24. « Democratic Republic of the Congo ». Freedom in the World 2022. [Date de consultation : 2023-02-22]

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Human Rights Watch (HRW). 2022-04-07. Thomas Fessy. « Congo Jails 12 Activists as Repression Intensifies in the East ». [Date de consultation : 2023-02-27]

Human Rights Watch (HRW). 2022-03-22. « DR Congo: Martial Law Brings Crackdown in East ». [Date de consultation : 2022-02-23]

Human Rights Watch (HRW). 2022-01-13. « Democratic Republic of Congo ». World Report 2022: Events of 2021. [Date de consultation : 2023-02-22]

Human Rights Watch (HRW). 2021-10-06. Thomas Fessy. « Congo First Lady's Foundation Accuses Activists ». [Date de consultation : 2023-03-23]

Human Rights Watch (HRW). 2021-07-22. Thomas Fessy. « Hasty, Harsh Sentence for Congo Critic ». [Date de consultation : 2023-02-27]

Human Rights Watch (HRW). 2021-07-19. « DR Congo: Free Youth Activists ». [Date de consultation : 2023-02-27]

Human Rights Watch (HRW). 2021-01-28. « DR Congo: Repression Escalates ». [Date de consultation : 2023-03-8]

Human Rights Watch (HRW). 2021-01-21. Thomas Fessy. « Youth Activists Acquitted in Congo ». [Date de consultation : 2023-02-27]

International Center for Not-for-Profit Law (ICNL). 2022-12-23. « Democratic Republic of the Congo ». [Date de consultation : 2023-03-08]

International Center for Not-for-Profit Law (ICNL). S.d. « About Us ». [Date de consultation : 2023-03-13]

Journaliste en danger (JED). 2022-11-02. « Alertes et menaces sur la liberté de la presse ». [Date de consultation : 2023-03-08]

Journaliste en danger (JED). 2021-11-01. « RDC : JED rend public son rapport annuel intitulé: 'Mauvais temps pour la presse' ». [Date de consultation : 2023-03-23]

Journaliste en danger (JED). 2021-08-14. « Ituri : JED exprime sa profonde consternation après l'assassinat d'un journaliste très critique contre l'insécurité qui règne dans sa province ». [Date de consultation : 2023-03-06]

Journaliste en danger (JED). S.d. « Qui sommes-nous ». [Date de consultation : 2023-03-13]

Lutte pour le changement (Lucha). 2022-01-24. « Beni (Nord-Kivu) : un autre militant de la LUCHA abattu par les 'forces de l'ordre' ». [Date de consultation : 2023-02-24]

Lutte pour le changement (Lucha). S.d. « Qui sommes-nous? » [Date de consultation : 2023-03-13]

Nations Unies. 2021-07-15. Haute-Commissaire aux droits de l’homme. Human Rights Situation and the Activities of the United Nations Joint Human Rights Office in the Democratic Republic of the Congo. (A/HRC/48/47) [Date de consultation : 2023-02-27]

Nations Unies. 2021-06. Bureau conjoint aux droits de l’homme en République démocratique du Congo (BCNUDH). Analysis of the Human Rights Situation Between January and June 2021. [Date de consultation : 2023-03-24]

Politico. 2021-07-20. « Condamné à 2 ans de prison ferme, Jacky Ndala passe sa première nuit à la prison de Makala ». [Date de consultation : 2023-02-27]

Radio France internationale (RFI). 2021-07-19. « RDC : arrestation de Jacky Ndala, le président de la Ligue des jeunes du parti de Moïse Katumbi ». [Date de consultation : 2023-02-27]

Radio Okapi. 2021-11-11. « Beni : 13 militants de la LUCHA arrêtés lors d'une manifestation contre une 12e prorogation de l'état de siège ». [Date de consultation : 2023-03-06]

Reporters sans frontières (RSF). 2022-05-23. « Three Journalists Tortured by DRC Intelligence Agency ». [Date de consultation : 2023-03-24]

Reporters sans frontières (RSF). 2020-10-14. « Radio Journalist in Hiding After Death Threats by Generals in Eastern DRC ». [Date de consultation : 2023-03-08]

Reporters sans frontières (RSF). 2020-09-18. « DRC: Another Journalist Arrested on Complaint by Sankuru Province Governor ». [Date de consultation : 2023-03-08]

Royaume-Uni (R.-U.). 2022-12. Foreign, Commonwealth & Development Office. Human Rights & Democracy: The 2021 Foreign, Commonwealth & Development Office Report. [Date de consultation : 2023-03-07]

Autres sources consultées

Sources orales : Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme; chercheur qui s’intéresse principalement aux politiques et aux conflits environnementaux en RDC; Commission africaine des droits de l’homme et des peuples; Friends of the Congo; Health-Education-Community Action-Leadership (HEAL) Africa; Nations Unies – Haute-Commissaire aux droits de l’homme; professeur de science politique dans une université américaine dont les recherches portent sur la RDC; scientifique social dont les recherches portent sur le pouvoir et la résistance liés à l’accaparement des terres pour les ressources naturelles, y compris en RDC; La Voix des sans voix.

Sites Internet, y compris : Addis Ababa University – Institute for Peace and Security Studies; Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme; Anadolu Agency; Australie – Department of Foreign Affairs and Trade; Austrian Red Cross – ecoi.net; Belgique – Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides; Centre d’études stratégiques de l’Afrique; CNBC Africa; Commission africaine des droits de l’homme et des peuples; Cour africaine des droits de l’homme et des peuples; Danemark – Danish Immigration Service; Freedom from Torture; Global Centre for the Responsibility to Protect; The Guardian; mediacongo.net; Nations Unies – Conseil des droits de l’homme, Conseil de sécurité, Haut-Commissariat aux droits de l’homme, Haut Commissariat pour les réfugiés, Programme alimentaire mondial, ReliefWeb; The New Humanitarian; Physicians for Human Rights; Reuters; Royaume-Uni – Home Office; Union européenne – EU Agency for Asylum; La Voix de l’UCG.



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