Réponses aux demandes d'information

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Les réponses aux demandes d'information (RDI) citent des renseignements qui sont accessibles au public au moment de leur publication et dans les délais fixés pour leur préparation. Une liste de références et d'autres sources consultées figure dans chaque RDI. Les sources citées sont considérées comme les renseignements les plus récents accessibles à la date de publication de la RDI.    

Les RDI n'apportent pas, ni ne prétendent apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile donnée. Elles visent plutôt à appuyer le processus d'octroi de l'asile. Pour obtenir plus de renseignements sur la méthodologie utilisée par la Direction des recherches, cliquez ici.   

C'est aux commissaires indépendants de la CISR (les décideurs) qu'il incombe d'évaluer les renseignements contenus dans les RDI et de décider du poids qui doit leur être accordé après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties.    

Les renseignements présentés dans les RDI reflètent uniquement les points de vue et les perspectives des sources citées et ne reflètent pas nécessairement la position de la CISR ou du gouvernement du Canada.    

24 mai 2022

NGA200982.EF

Nigéria : information sur le traitement réservé aux personnes qui contractent un mariage interconfessionnel dans l'État de Lagos, y compris une chrétienne qui épouse un musulman qui se convertit ensuite au christianisme; cas de couples qui ont été trouvés par le bouche-à-oreille dans la communauté musulmane lorsqu'ils ont déménagé dans des villes comme Port Harcourt ou Ibadan (2015–mars 2022)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Lois

La constitution du Nigéria prévoit ce qui suit :

[traduction]

15. Objectifs politiques

  1. La devise de la République fédérale du Nigéria est Unité et Foi, Paix et Progrès.
  2. Par conséquent, l'intégration nationale est activement encouragée, tandis que la discrimination fondée sur le lieu d'origine, le sexe, la religion, le statut, les liens ou les attaches relatifs à l'appartenance ethnique ou à la langue est interdite.
  3. Aux fins de la promotion de l'intégration nationale, il est du devoir de l'État :
    1. de fournir des installations adéquates et d'encourager la libre circulation des personnes, des biens et des services dans l'ensemble de la Fédération;
    2. de garantir les pleins droits de résidence de tous les citoyens partout dans la Fédération;
    3. d'encourager les mariages mixtes entre des personnes provenant de lieux d'origine différents ou qui appartiennent à des groupes religieux, ethniques ou linguistiques différents;
    4. de promouvoir ou d'encourager la formation d'associations qui transcendent des obstacles ethniques, linguistiques, religieux ou autres.

[…] (Nigéria 1999).

2. Mariage interreligieux au Nigéria
2.1 Fréquence

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un professeur d'études religieuses à l'Université d'Ibadan a déclaré que le mariage interconfessionnel est une [traduction] « pratique courante » au Nigéria (professeur 8 mars 2022). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches après un entretien, Insa Nolte, professeure titulaire du Département d'études africaines et d'anthropologie (Department of African Studies and Anthropology) de l'Université de Birmingham, dont les travaux portent sur les relations interconfessionnelles entre musulmans et chrétiens au Yoroubaland [Sud-Ouest du Nigéria], a déclaré qu'en plus de l'enquête qu'elle a menée sur le mariage entre musulmans et chrétiens au Yoroubaland en 2012-2013 et de l'Enquête démographique et de santé du Nigéria (Nigeria Demographic and Health Survey – NDHS) [1], qui [traduction] « se concentre sur une tranche d'âge limitée », il existe « très peu de données récentes » sur la religion pour l'ensemble du Nigéria (Nolte 30 mars 2022). Insa Nolte a ajouté qu'il existe [traduction] « certaines preuves » que le mariage interreligieux a décliné et est devenu « plus difficile » au cours des quatre dernières décennies, en particulier dans les régions où il y a un « conflit religieux », mais il reste « relativement répandu » dans certaines régions, y compris dans l'État de Lagos (Nolte 30 mars 2022). L'enquête sur les [traduction] « expériences de rencontres interreligieuses et les attitudes à l'égard de celles-ci dans la vie familiale et la vie sociale quotidienne », menée par Insa Nolte en 2012-2013 au Yoroubaland auprès de 2 819 répondants, a constaté que le Yoroubaland avait un « niveau relativement élevé de mariages interreligieux »; 9 p. 100 des répondants ont indiqué qu'ils sont mariés à une personne d'une religion différente et ce chiffre passe à 24,9 p. 100 lorsque l'on inclut les répondants qui ont épousé une personne qui avait une religion différente avant que l'un des époux ne change de religion (Nolte, et al. 2018, 28, 29–30, 46).

2.2 Attitudes de la société et traitement

Dans un article publié dans Islam and Civilisational Renewal (ICR), une revue à comité de lecture faisant la promotion de [traduction] « la recherche avancée sur la contribution des musulmans à la science et à la culture » (ICR s.d.), Ibrahim Imam, chargé de cours supérieur de droit public à l'Université d'Ilorin, remarque que les amitiés entre des personnes de religions différentes sont [traduction] « tolérées » au Nigéria, mais pas les relations amoureuses (Imam 15 oct. 2016, 496, 504). En revanche, selon d'autres sources, l'acceptation du mariage interconfessionnel dépend de la famille et de la région (Nolte 30 mars 2022; professeur 8 mars 2022). Insa Nolte a fait observer que malgré une [traduction] « acceptation générale », « certains » groupes musulmans et chrétiens minoritaires sont « tout à fait opposés aux mariages interconfessionnels »; dans « certaines » régions où la « majorité » des familles établies est soit chrétienne, soit musulmane, le mariage interconfessionnel est perçu comme « quelque chose qui remet en question l'ordre établi » (Nolte 30 mars 2022). Selon un article d'Insa Nolte, même si les mariages interconfessionnels sont [traduction] « relativement fréquents », ils sont aussi considérés avec « réserves » tant par les musulmans que par les chrétiens (Nolte 21 avr. 2020, 2). L'article souligne en outre que dans l'enquête menée par Insa Nolte, 47,9 p. 100 des interlocuteurs yorouba recommandent le mariage interconfessionnel alors que 42,5 p. 100 le déconseillent (Nolte 21 avr. 2020, 6). De même, selon le professeur, les points de vue sur le mariage interconfessionnel sont variés; certaines familles chrétiennes et musulmanes ont renié leurs enfants ou ont retiré leur soutien en matière d'éducation, et d'autres ont une attitude plus [traduction] « permissive » (professeur 8 mars 2022). Le professeur a en outre remarqué qu'il existe des cas de couples interconfessionnels exposés à [traduction] « de la violence et de la discrimination » ainsi qu'à « des mauvais traitements [et] de l'oppression »; certains parents menacent leurs enfants de mort s'ils restent dans une relation interconfessionnelle (professeur 8 mars 2022).

Selon un article du Christian Science Monitor, un journal international publié par La Première Église du Christ, Scientiste (The Christian Science Monitor s.d.), une musulmane et un chrétien qui se sont épousés à Maiduguri, la capitale de l'État de Borno, ont reçu la bénédiction de la famille de la femme et l'homme a déclaré que [traduction] « "les membres de la communauté [l']ont toujours traité comme un des leurs" » (The Christian Science Monitor 18 mai 2018). Le professeur a souligné que certains partis sont permissifs à l'égard des relations interconfessionnelles (professeur 8 mars 2022). Insa Nolte a écrit qu'il existe un [traduction] « niveau général de sociabilité » où le mariage interconfessionnel n'est pas considéré comme un problème, et qu'il existe « plusieurs » politiciens musulmans yorouba « influents » dont la carrière a bénéficié de leur mariage avec des chrétiennes, puisque la relation a diminué les craintes d'exclusivité ou de discrimination (Nolte 30 mars 2022).

Le professeur a souligné que les personnes qui entretiennent des relations interconfessionnelles ne sont [traduction] « pas vraiment marginalisées » dans les villes du Sud du Nigéria, comme Port Harcourt, alors que les couples interconfessionnels du Nord sont exposés à « beaucoup de risques » (professeur 8 mars 2022). Selon la même source, dans la ville de Lagos, les couples interconfessionnels [traduction] « vivent ensemble en harmonie » et bien qu'il y ait « peut-être de la persécution » de la part de la famille, ce n'est pas un « problème sociétal » (professeur 8 mars 2022). De même, Insa Nolte a écrit que [traduction] « de nombreuses » communautés dans le Nord-Ouest des régions yorouba sont « majoritairement » musulmanes, tandis que le christianisme « domine » dans le Sud-Est des régions yorouba; le mariage interconfessionnel est « plus facile » dans le Centre des régions yorouba, où il y a « un nombre important » de membres des deux religions (Nolte 30 mars 2022).

2.3 Traitement réservé par les autorités

Le professeur a observé qu'un couple interconfessionnel qui reçoit une menace peut la signaler à la police, qui suivra la procédure établie; l'affaire sera déférée aux tribunaux si une vie est menacée (professeur 8 mars 2022). Le professeur a ajouté que [traduction] « parfois » les chefs religieux ou leurs représentants peuvent être invités à une réunion de paix pour aider à rétablir l'ordre pour les parties touchées (professeur 8 mars 2022). À la question lui demandant si les couples interconfessionnels sont traités différemment par la police, Insa Nolte a répondu qu'elle n'était pas au courant d'une telle situation dans le Sud-Ouest du Nigéria (Nolte 30 mars 2022).

3. Conversion au christianisme

Selon le professeur, la conversion [traduction] « n'est pas considér[ée] comme une question sociétale litigieuse » et elle est « très courante » (professeur 8 mars 2022). En revanche, dans un rapport d'Open Doors, une organisation qui [traduction] « ser[t] les chrétiens persécutés » dans plus de 70 pays et fournit des bibles et du matériel de formation, entre autres formes de soutien (Open Doors s.d.), on peut lire que les chrétiens qui ont une [traduction] « origine musulmane » peuvent être rejetés par leurs familles, soumis à des pressions pour renoncer au christianisme, ou faire face à de la violence physique (Open Doors janv. 2022, 7). Même si Insa Nolte a souligné que de nombreux parents musulmans restent proches de leurs enfants qui se sont convertis, elle a également affirmé que la conversion au christianisme peut causer [traduction] « des difficultés importantes pour les hommes musulmans » qui peuvent se voir refuser l'accès aux ressources communes de la famille élargie, comme les terres agricoles, les entreprises familiales ou les héritages (Nolte 30 mars 2022). Insa Nolte a en outre déclaré que les convertis de [traduction] « familles élargies musulmanes très anciennes dans l'État de Lagos » s'exposeraient également à des « problèmes » avec leur famille élargie (Nolte 30 mars 2022). La même source a ajouté que puisque l'État de Lagos comprend de nombreuses villes [traduction] « plus petites » en plus de la ville de Lagos, les musulmans convertis au christianisme peuvent s'exposer à la critique des musulmans selon leur lieu de résidence (Nolte 30 mars 2022).

Insa Nolte a écrit qu'elle n'est pas au courant d'un soutien offert par l'État aux personnes qui se convertissent, mais elle a expliqué qu'ils se tourneraient vers leur église (Nolte 30 mars 2022). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement allant dans le même sens.

4. Capacité de la communauté musulmane à retrouver un couple

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu de renseignements sur des couples qui ont été retrouvés par la communauté musulmane après un déménagement.

Selon Insa Nolte, les personnes qui ne sont plus musulmanes peuvent éviter le contact avec leur famille élargie [traduction] « pendant des périodes importantes » en déménageant, en particulier dans « une ville majoritairement chrétienne » (Nolte 30 mars 2022). La même source a également écrit que mis à part exclure l'enfant non musulman de l'héritage, elle n'est au courant d'aucun cas où des parents ont [traduction] « puni » ou « causé un préjudice » à leur enfant en raison de sa conversion (Nolte 30 mars 2022).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Note

[1] Aucune statistique sur les mariages interconfessionnels n'a pu être trouvée dans le rapport de la plus récente Enquête démographique et de santé du Nigéria (Nigeria Demographic and Health Survey – NDHS), menée d'août à décembre 2018 par la Commission nationale de la population (National Population Commission – NPC) du Nigéria et ICF, l'organisation responsable du programme international d'enquêtes démographiques et de santé (Demographic Health Surveys – DHS) de l'Agence des États-Unis pour le développement international (US Agency for International Development – USAID) (NPC of Nigeria et ICF oct. 2019, 1).

Références

The Christian Science Monitor. 18 mai 2018. Ryan Lenora Brown et Ismail Alfa Abdulrahim. « In a Nigerian Melting Pot, Living – and Loving – Despite Boko Haram ». [Date de consultation : 7 mars 2022]

The Christian Science Monitor. S.d. « What Is The Christian Science Monitor? ». [Date de consultation : 7 mars 2022]

Imam, Ibrahim. 15 octobre 2016. « Shariah and Human Rights Perspective on Interfaith Marriage: Challenges Impeding Its Practice in Nigeria ». Islam and Civilisational Renewal (ICR). Vol. 7, no 4. [Date de consultation : 22 mars 2022]

Islam and Civilisational Renewal (ICR). S.d. « About the Journal ». [Date de consultation : 7 mars 2022]

National Population Commission (NPC) of Nigeria et ICF. Octobre 2019. Nigeria Demographic and Health Survey 2018. [Date de consultation : 24 mai 2022]

Nigéria. 1999 (modifiée en 2017). The Constitution of the Federal Republic of Nigeria 1999. Dans World Constitutions Illustrated. Sous la direction de Jefri Jay Ruchti. Buffalo, N.Y. : William S. Hein & Co., Inc. [Date de consultation : 5 mars 2022]

Nolte, Insa. 30 mars 2022. Communication écrite envoyée après un entretien avec la Direction des recherches.

Nolte, Insa. 21 avril 2020. « "At Least I Am Married" : Muslim–Christian Marriage and Gender in Southwest Nigeria ». Social Anthropology/Anthropologie Sociale. Vol. 28, no 2. Envoyé à la Direction des recherches par Insa Nolte, 14 mars 2022.

Nolte, Insa M., Clyde Ancarno et Rebecca Jones. 2018. « Inter-Religious Relations in Yorubaland, Nigeria: Corpus Methods and Anthropological Survey Data ». Corpora. Vol. 13, no 1. [Date de consultation : 5 mars 2022]

Open Doors. Janvier 2022. World Watch Research. Nigeria : Full Country Dossier. [Date de consultation : 2 mars 2022]

Open Doors. S.d. « Our History ». [Date de consultation : 7 mars 2022]

Professeur, University of Ibadan. 8 mars 2022. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Autres sources consultées

Sources orales : chargé de cours supérieur en études religieuses dans une université au Nigéria; chef du département d'études religieuses et culturelles dans une université au Nigéria; chef du département d'études religieuses dans une université au Nigéria; chercheur qui étudie les religions en Afrique dans une université au Nigéria; Christian Association of Nigeria; Christian Council of Nigeria; Church of Nigeria (Anglican Communion) – The Diocese of Lagos; coordonnateur du département d'études religieuses dans une université au Nigéria; Nigeria-Inter Religious Council; professeur agrégé d'études africaines dans une université aux États-Unis dont les recherches portent sur le christianisme au Nigéria; professeurs de religion dans une université au Nigéria (2).

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Allemagne – Federal Office for Migration and Refugees; Amnesty International; Australie – Department of Foreign Affairs and Trade; Belgique – Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides; Bertelsmann Stiftung; Center for Strategic and International Studies; The Christian Century; Christianity Today; Conseil œcuménique des Églises; CSW; ecoi.net; États-Unis – CIA, US Commission on International Religious Freedom; France – Office français de protection des réfugiés et apatrides; Freedom House; The Guardian [Nigéria]; Hudson Institute – Center for Religious Freedom; Human Rights Watch; Independent Catholic News; International Christian Concern; International Rescue Committee; Minority Rights Group International; The Nation [Nigéria]; National Catholic Reporter; Nations Unies – Bureau de la coordination des affaires humanitaires, Haut Commissariat pour les réfugiés, Refworld; The New Humanitarian; News Agency of Nigeria; Nigéria – Marriage Act; Norvège – Landinfo; Pays-Bas – Ministry of Foreign Affairs; Policy and Legal Advocacy Centre; The Punch; Royaume-Uni – All-Party Parliamentary Group for International Freedom of Religion or Belief, Home Office; The Sun [Nigéria]; Union européenne – EU Agency for Asylum; University of Ibadan – Department of Guidance and Counseling, Faculty of Education; Vanguard; The Washington Post.



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