Réponses aux demandes d'information

​​​Les réponses aux demandes d’information (RDI) sont des rapports de recherches sur les conditions dans les pays. Ils font suite à des demandes des décideurs de la CISR.

La base de données contient les RDI en français et anglais archivées depuis sept ans. Les RDI antérieures sont accessibles sur le site Web European Country of Origin Information Network.

Les RDI publiées par la CISR sur son site Web peuvent contenir des documents annexés inaccessibles en raison de problèmes techniques et peuvent inclure des traductions de documents initialement rédigées dans d'autres langues que l'anglais ou le français. Pour obtenir une copie d'un document annexé et/ou une version traduite des documents annexés de RDI, veuillez en faire la demande par courriel.

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Les réponses aux demandes d'information (RDI) citent des renseignements qui sont accessibles au public au moment de leur publication et dans les délais fixés pour leur préparation. Une liste de références et d'autres sources consultées figure dans chaque RDI. Les sources citées sont considérées comme les renseignements les plus récents accessibles à la date de publication de la RDI.    

Les RDI n'apportent pas, ni ne prétendent apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile donnée. Elles visent plutôt à appuyer le processus d'octroi de l'asile. Pour obtenir plus de renseignements sur la méthodologie utilisée par la Direction des recherches, cliquez ici.   

C'est aux commissaires indépendants de la CISR (les décideurs) qu'il incombe d'évaluer les renseignements contenus dans les RDI et de décider du poids qui doit leur être accordé après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties.    

Les renseignements présentés dans les RDI reflètent uniquement les points de vue et les perspectives des sources citées et ne reflètent pas nécessairement la position de la CISR ou du gouvernement du Canada.    

28 septembre 2021

PAK200787.EF

Pakistan : information sur les fatwas émises à Karachi et la période de validité des fatwas qui doivent être exécutées dans d’autres villes du Pakistan, en particulier à Sialkot (2016-septembre 2021)

Direction des recherches, Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada

Pour obtenir des renseignements au sujet des fatwas, y compris leur portée (locale ou nationale), leur forme (écrite ou verbale) et leur diffusion, veuillez consulter la réponse à la demande d’information PAK200386 publiée en janvier 2021.

1. Émission des fatwas

Selon des sources, une fatwa est un [traduction] « avis » (analyste de recherche 10 sept. 2021; professeur adjoint 15 sept. 2021; professeur agrégé 15 sept. 2021). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un analyste de recherche au Pak Institute for Peace Studies (PIPS), un groupe de réflexion, de recherche et de revendication au Pakistan dont l'objectif est la résolution des conflits basée sur le savoir (PIPS s.d.), a déclaré que [traduction] « tout dignitaire ou érudit religieux » peut émettre une fatwa (analyste de recherche 10 sept. 2021). Par ailleurs, au cours d’un entretien avec la Direction des recherches, un professeur agrégé d’études religieuses à l’Université Saint Mary's, dont les recherches portent sur l’islam en Asie du Sud, a affirmé que les [traduction] « fatwas sont émises par quiconque a le moindre pouvoir juridique » (professeur agrégé 15 sept. 2021). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un avocat au Pakistan, qui est avocat à la Cour suprême, a déclaré que [traduction] « toute personne » peut obtenir une fatwa (avocat 16 sept. 2021).

Selon un professeur adjoint à la Faculté de charia et de droit (Faculty of Shariah and Law) à l’Université islamique internationale à Islamabad, il n’y a pas [traduction] « d’institution officielle » qui émet ou exécute les fatwas au Pakistan, ce qui cré un « pouvoir illimité » d’émettre des fatwas (professeur adjoint 15 sept. 2021). Selon des sources, les fatwas varient en fonction des sectes religieuses qui les émettent (professeur adjoint 15 sept. 2021; expert des droits de la personne 16 sept. 2021; avocat 16 sept. 2021).

2. Exécution

Selon des sources, les fatwas ne sont pas juridiquement contraignantes (avocat 16 sept. 2021; analyste de recherche 10 sept. 2021). Des sources affirment que l’adhésion à une fatwa variera en fonction de l’identité de l’émetteur (analyste de recherche 10 sept. 2021; professeur agrégé 15 sept. 2021; expert des droits de la personne 16 sept. 2021) et si cet émetteur a des adeptes susceptibles de l’exécuter (professeur agrégé 15 sept. 2021; expert des droits de la personne 16 sept. 2021). Au cours d’un entretien avec la Direction des recherches, un expert des droits de la personne, qui a des connaissances sur la liberté de religion au Pakistan et qui travaille avec des minorités religieuses au Pakistan depuis 2013, a dit que [traduction] « celui qui émet la fatwa en établit son poids » et que selon la secte, la force du soutient au dignitaire religieux qui émet la fatwa et la portée de son réseau de séminaires, la fatwa pourrait « se répandre dans tout le pays » (expert des droits de la personne 16 sept. 2021).

Selon l’avocat, même si les fatwas ne doivent pas être exécutées légalement par une institution de l’État, [traduction] « une fatwa peut être exécutée volontairement par la personne ou le groupe qui l’obtient ou par toute autre tierce partie » (avocat 16 sept. 2021). De même, au dire de l’expert des droits de la personne [traduction] « n’importe qui » peut exécuter une fatwa (expert des droits de la personne 16 sept. 2021). D’après le professeur agrégé, même si une fatwa ne force pas les gens à agir, une personne visée par une fatwa peut se trouver dans une situation [traduction] « très risquée » si l’autorité émettrice a les moyens et un réseau pour l’exécuter (professeur agrégé 15 sept. 2021). La même source a expliqué que [traduction] « [l’]État n’a presque aucun contrôle pour arrêter les fatwas; c’est un peu l’anarchie » (professeur agrégé 15 sept. 2021). Le professeur agrégé a en outre dit que si la fatwa est émise par les dignitaires religieux d’un groupe [traduction] « crédible », comme les talibans, ce « n’est pas tant une décision judiciaire, mais votre tête est mise à prix, ce qui est beaucoup plus grave » (professeur agrégé 15 sept. 2021). La même source a affirmé que la structure des [traduction] « acteurs non étatiques », comme les talibans, comporte « souvent » un dignitaire religieux « au sommet » dont le délégué émet des fatwas (professeur agrégé 15 sept. 2021).

L’analyste de recherche a expliqué que si une personne commet une infraction ou un crime alors qu’elle exécute une fatwa, elle sera quand même punie selon les lois du Pakistan, car le fait de suivre une fatwa ne confère pas [traduction] « une immunité ou des concessions » juridiques (analyste de recherche 10 sept. 2021). De même, l’avocat a écrit que les fatwas [traduction] « ne peuvent pas l’emporter sur la loi ou un précédent judiciaire » (avocat 16 sept. 2021) et le professeur agrégé a dit que les fatwas s’appuient sur des sources religieuses, alors que le code pénal du Pakistan a été hérité de l’Angleterre dans les années 1860 (professeur agrégé 15 sept. 2021).

3. Différences régionales

D’après l’avocat, il existe des différences géographiques au regard des fatwas en fonction de la secte dominante dans la région où elle est émise (avocat 16 sept. 2021). Selon le professeur adjoint, même si une fatwa n’impose aucune obligation légale aux gens, ils sont [traduction] « moralement tenus » de l’exécuter, peu importe l’endroit où ils se trouvent; par conséquent, par exemple, « une fatwa émise à Karachi peut être exécutée dans d’autres villes, p. ex. : Sialkot » (professeur adjoint 15 sept. 2021). L’analyste de recherche a écrit que les fatwas émises par les érudits religieux et les institutions religieuses ayant l’autorité appropriée pour le faire sont perçues comme étant plus crédibles et Karachi dispose d’érudits et d’institutions ayant ce statut, ce qui signifie que des gens de n’importe où peuvent suivre leurs fatwas (analyste de recherche 10 sept. 2021).

Selon l’avocat, les fatwas sont le plus souvent émises sur papier et [traduction] « certains » dignitaires religieux ou leurs institutions publient leurs fatwas en ligne (avocat 16 sept. 2021). Toutefois, au dire du professeur agrégé, les fatwas étaient auparavant émises sur papier, mais [traduction] « de nos jours, les fatwas sont facilement accessibles sur Internet » et, avec Internet, « les gens se dénoncent les uns les autres » et il est « très difficile d’être anonyme au Pakistan » (professeur agrégé 15 sept. 2021). La même source a dit que même si Karachi est une grande ville, elle peut [traduction] « sembler très petite » et que si quelqu’un à Karachi est visé par une Fatwa, la ville est « trop petite pour s’y cacher » (professeur agrégé 15 sept. 2021). En discutant des fatwas émises contre les blasphémateurs, l’expert des droits de la personne a affirmé qu’elles ne se limitent pas à la ville où elles ont été émises et [traduction] « [qu’]une fatwa émise à Karachi peut se propager à Islamabad ou à Lahore » et que les fatwas contre les blasphémateurs deviennent nationales (expert des droits de la personne 16 sept. 2021). La source a aussi dit que les personnes visées par une fatwa pour blasphème tentent de quitter le Pakistan, [traduction] « car ils ne sont en sécurité nulle part » (expert des droits de la personne 16 sept. 2021).

4. Période de validité

Selon l’analyste de recherche, [traduction] « [l]es fatwas n’ont rien qui ressemble à une échéance ou une période de validité » (analyste de recherche 10 sept. 2021) et le professeur adjoint a remarqué [traduction] « [qu’]il n’y a aucune limite de temps » (professeur adjoint 15 sept. 2021). Par ailleurs, l’avocat a dit que les fatwas [traduction] « ne sont pas déterminées au regard du territoire ou du temps » et le lieu d’émission d’une fatwa ou le temps écoulé depuis son émission sont sans importance (avocat 16 sept. 2021). Selon l’expert des droits de la personne, les personnes visées par une fatwa pour blasphème ont peur [traduction] « même six ou sept ans » plus tard, car quiconque apprend l’existence de la fatwa peut l’utiliser « comme un outil pour se venger » (expert des droits de la personne 16 sept. 2021). En parlant des fatwas émises par des groupes ou des acteurs non étatiques comme les talibans, le professeur agrégé a affirmé qu’une fatwa est [traduction] « une chose que les gens peuvent exécuter des années plus tard » (professeur agrégé 15 sept. 2021).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l’aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n’apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d’une demande d’asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d’information.

Références

Analyste de recherche, Pak Institute for Peace Studies (PIPS). 10 septembre 2021. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Avocat, cabinet d’avocats à Lahore. 16 septembre 2021. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Expert des droits de la personne, Christian Solidarity Worldwide. 16 septembre 2021. Entretien avec la Direction des recherches.

Pak Institute for Peace Studies (PIPS). S.d. « Concept Note ». [Date de consultation : 17 sept. 2021]

Professeur adjoint, International Islamic University. 15 septembre 2021. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Professeur agrégé, Saint Mary's University. 15 septembre 2021. Entretien téléphonique avec la Direction des recherches.

Autres sources consultées

Sources orales : avocat au Pakistan qui est membre du Sindh Bar Council et de la Karachi Bar Association; Centre for Peace and Development Initiatives Pakistan; chargé de cours au département d’études des fatwas dans une université au Pakistan; Human Rights Commission of Pakistan; Manohar Parrikar Institute for Defence Studies and Analyses; Pakistan Lawyers Foundation; professeur de droit international dans une université au Royaume-Uni; professeur de droit islamique dans une université au Canada; professeur de droit islamique dans une université au Royaume-Uni; professeur d’études islamiques dans une université aux États-Unis; professeur d’études islamiques et de religions d’Asie du Sud dans une université aux États-Unis; professeur d’études religieuses dans un collège aux États-Unis; professeur d’islam politique dans une université canadienne.

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Amnesty International; Australie – Department of Foreign Affairs and Trade; Austrian Red Cross – Austrian Centre for Country of Origin and Asylum Research and Documentation; BBC; Bertelsmann Stiftung; Dawn; États-Unis – Department of State, Bureau of Counterterrorism, Bureau of Democracy, Human Rights and Labor, Foreign Assistance Resource Library, Office of International Religious Freedom, Overseas Security Advisory Council; Human Rights Commission of Pakistan; Institute of Development Studies; International Institute of Islamic Thought; International Research Journal of Social Sciences; Journal of Islamic Studies and Culture; Middle East Media Research Institute; Minority Rights Group International; Norvège – Landinfo; Oxford Islamic Studies Online; Pakistan – Council of Islamic Ideology, High Court of Sindh, Ministry of Religious Affairs and Interfaith Harmony; Pakistan Ulema Council; Pays-Bas – Ministry of Foreign Affairs; Pologne – Urząd do Spraw Cudzoziemców; Royaume-Uni – Home Office; Union européenne – European Asylum Support Office.



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