Mexique : information sur l’accès aux bases de données de renseignements personnels par la police ou par de tierces parties, y compris information indiquant qui dispose d’un tel accès; récentes atteintes à la protection des données (2017-août 2019)
1. Plataforma México
1.1 Aperçu
D’après une présentation faite en 2008 par le Secrétariat de la sécurité publique (Secretaría de Seguridad Pública - SSP) [1], Plataforma México est un système d’information et de télécommunications qui [traduction] « relie toutes les bases de données liées à la sécurité publique » (Mexique oct. 2008, 2). Selon le site Internet du Secrétariat exécutif du Conseil d’État pour la sécurité publique (Secretariado Ejecutivo del Consejo Estatal de Seguridad Pública) de San Luis Potosí, Plataforma México est un réseau national qui relie des bases de données judiciaires utilisées par le personnel de la sécurité publique, administrées par la Coordination générale du Secrétariat de la sécurité publique (Coordinación General de Secretaría de Seguridad Pública), un organisme fédéral (San Luis Potosí s.d.). La même source signale que le système est utilisé, [traduction] « entre autres applications », pour « la recherche criminalistique liée aux enlèvements, à l’extorsion, au chantage et à la fraude », ainsi que pour « la prévention de la criminalité et l’application de la loi, la protection des zones frontalières, la lutte contre les activités terroristes et le contrôle des migrations » (San Luis Potosí s.d.).
Selon le Libro Blanco del Programa Presupuestario R903 "Plataforma México", qui renferme un sommaire du développement et de l’utilisation de Plataforma México de décembre 2012 à septembre 2018 et qui a été préparé par la Commission nationale de la sécurité (Comisionado Nacional de Seguridad - CNS) du Mexique, Plataforma México est
[traduction]
l’outil d’information de l’État mexicain qui appuie les activités des institutions chargées de la sécurité publique au pays, reliant les différents systèmes de sécurité publique des trois niveaux de gouvernement et favorisant l’interopérabilité et l’échange de renseignements.
La plateforme dispose à l’heure actuelle d’une vaste infrastructure de télécommunications, de radiodiffusion et de capacité calculatoire, à laquelle sont connectées plus de 900 unités des trois niveaux de gouvernement. Il y a plus de 100 bases de données et plus de 60 systèmes d'information (Mexique oct. 2018, 3).
Selon la même source, le réseau renferme plus de 793 millions d'entrées (Mexique oct. 2018, 4).
D’après les Country Reports on Human Rights Practices for 2008 publiés par le Département d’État des États-Unis, l'implantation de Plataforma México s’est amorcée en avril 2008 et [traduction] « a amélioré les échanges de renseignements aux fins de l’application de la loi entre les services policiers » (É.-U. 25 févr. 2009). Dans les Country Reports 2012, on peut lire que [traduction] « le SSP a continué d’élargir la plateforme d’analyse et de télécommunications intranet, Plataforma M[é]xico, qui a été continuellement mise à jour avec de l’information sur la police à tous les niveaux et qui a été utilisée dans le cadre des évaluations du personnel et des enquêtes en cours » (É.-U. 19 avr. 2013).
D’après la présentation du SSP donnée en 2008, Plataforma México regroupe le réseau du gouvernement du Mexique, 32 nœuds d’interconnexion des capitales d’État et du district fédéral, 45 nœuds d’interconnexion secondaires, la connectivité aux réseaux d’État, le réseau du Bureau du procureur général (Procuraduría General de Justicia - PGJ), le réseau des bureaux municipaux et d’État du SSP, le réseau de la Haute Cour de justice (Tribunal Superior de Justicia - TSJ), le réseau des écoles de police et le réseau des centres pénitenciers (centros de reinserción social - CERESOS) (Mexique oct. 2008, 6). De même, le site Internet du Secrétariat exécutif du Conseil d’État pour la sécurité publique de San Luis Potosí signale que les institutions suivantes sont incluses dans le réseau de Plataforma México :
[traduction]
- des organismes et institutions de la Sécurité publique (Seguridad Pública) des trois niveaux de gouvernement;
- les bureaux fédéraux et locaux du procureur général (PGJ);
- les centres de détention aux niveaux fédéral, étatique et municipal (Centros de Reclusión);
- les centres de certification, d’accréditation et de surveillance (Centros de Certificación, de Acreditación y Control de Confianza) ou leurs homologues;
- les conseils d’État de la sécurité publique (Consejos Estatales de Seguridad Pública);
- les académies et instituts de la sécurité publique et de l’administration de la justice (Academias e Institutos de Seguridad Pública y Procuración de Justicia);
- les organismes et institutions du gouvernement fédéral (Gobierno Federal) qui doivent obtenir une autorisation pour accéder aux outils ou aux applications de Plataforma México (San Luis Potosí s.d.).
La même source ajoute que le réseau comprend les bases de données suivantes :
- une base de données des rapports de police standardisés (Informe Policial Homologado - IPH), qui sont des comptes-rendus [traduction] « d’une intervention policière décrivant à quel moment et de quelle manière un événement est survenu »;
- le système automatisé d’identification par empreintes digitales (Sistema Automatizado de Identificación Dactilar);
- le registre des permis des conduire (Registro de Licencias de Conducir);
- le registre national des armes et des équipements (Registro Nacional de Armamento y Equipo);
- le registre national de l’information pénitentiaire (Registro Nacional de Información Penitenciaria - RNIP);
- le système automatisé de reconnaissance vocale (Sistema Automatizado de Identificación de Voz);
- le registre national du personnel de la sécurité publique (Registro Nacional de Personal de Seguridad Pública);
- un base de données sur les véhicules volés et retrouvés (Vehículos Robados y Recuperados);
- un base de données d'ADN (San Luis Potosí s.d.).
D’après la présentation du SSP donnée en 2008, Plataforma México est en mesure de relever l’information fournie dans les rapports de police et les situer sur une carte géographique, ce qui permet ensuite de générer des statistiques et des renseignements à l’intention des autorités policières (Mexique oct. 2008, 9).
Des sources affirment que les fonds investis dans Plataforma México ont diminué sous l’administration d’Enrique Peña Nieto [2012-2018] (Vanguardia pour El Universal 7 déc. 2018; Reporte Indigo 23 nov. 2015), mais que l’administration d’Andrés Manuel López Obrador souhaite relancer le réseau (Vanguardia pour El Universal 7 déc. 2018; Capital 7 déc. 2018). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements à ce sujet.
1.2 Accès
D’après le Libro Blanco de la CNS sur Plataforma México, à la fin de septembre 2018, il y avait 13 254 utilisateurs actifs enregistrés du système de Plataforma México, dont 5 206 au niveau fédéral, 4 723 au niveau étatique et 3 325 au niveau municipal (Mexique oct. 2018, 66). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements sur l’accès au système de Plataforma México, y compris sur l’accès illégal ou non autorisé par de tierces parties.
2. Autres moyens du gouvernement d’accéder aux renseignements
D’après les lignes directrices sur la collaboration en matière de sécurité publique et d’administration de la justice de l’Institut fédéral des télécommunications (Instituto Federal de Telecomunicacione), les données des utilisateurs stockées par les entreprises de télécommunications comprennent le nom et l’adresse de l’utilisateur enregistré, les numéros de la source et du destinataire, ainsi que le type, la durée, la date et l’heure de la communication (Mexique 2015, art. 14). Selon un rapport sur la collaboration entre les autorités chargées de la sécurité et de l’administration de la justice et les entreprises de télécommunication au Mexique, préparé par le Réseau de défense des droits numériques (Red en Defensa de los Derechos Digitales - R3D), une organisation sans but lucratif mexicaine qui milite pour les droits numériques, des renseignements obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information révèlent que, de 2016 à 2017, les entreprises de télécommunication ont reçu environ 146 000 demandes visant des données des utilisateurs, y compris des données de localisation, dont 46 110 demandes en provenance d’entités non autorisées ou non identifiées; parmi ces demandes, 40 839 ont été acceptées (R3D 2018, 3, 13).
Selon des sources, les téléphones cellulaires de journalistes au Mexique ont été pris pour cible par le logiciel espion Pegasus distribué par la société israélienne NSO Group, une entreprise de cyber-renseignement (Citizen Lab 27 nov. 2018; The Times of Israel 28 nov. 2018); ce logiciel permet d’accéder à des messages privés, ainsi qu’à la caméra et au microphone du téléphone (Citizen Lab 27 nov. 2018). Les mêmes sources signalent que le gouvernement du Mexique utilise le logiciel espion Pegasus (The Times of Israel 28 nov. 2018) ou est [traduction] « lié » à ce logiciel (Citizen Lab 27 nov. 2018). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements à ce sujet.
3. Sécurité des renseignements
Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu d’information sur les atteintes à la protection des données.
Des sources font état d’une fuite de données en avril 2016 touchant plus de 93 millions de dossiers d’enregistrement d'électeurs au Mexique, incluant les noms, les adresses et les dates de naissance (IBTimes 25 avr. 2016a; Mexico News Daily 22 avr. 2016), ainsi que les numéros d’identification nationaux (IBTimes 25 avr. 2016a). D’après un article paru en avril 2016 dans l’International Business Times (IBTimes), une revue numérique d’actualités mondiales dont les sièges sont à New York et à Londres (IBTimes s.d.), les autorités mexicaines n’avaient pas identifié publiquement [traduction] « le malfaiteur soupçonné » (IBTimes 25 avr. 2016b). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements à ce sujet.
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.
Note
[1] Le Secrétariat de la Sécurité publique (Secretaría de Seguridad Pública - SSP) a été remplacé en 2012 par la Commission nationale de la sécurité (Comisionado Nacional de Seguridad - CNS), qui relevait du ministère de l’Intérieur (Secretaría de Gobernación - SEGOB) (Animal Político 14 déc. 2012). Le 30 novembre 2018, le Secrétariat de la sécurité et de la protection des citoyens (Secretaría de Seguridad y Protección Ciudadana) a été créé (Mexique 2018, art. 26), remplaçant la CNS (La Jornada 7 janv. 2019).
Références
Animal Político. 14 décembre 2012. « Así quedó la Ley Orgánica de la Administración Pública Federal ». [Date de consultation : 30 juill. 2019]
Capital. 7 décembre 2018. Noemi Gutiérrez. « Gobierno federal actualizará la 'Plataforma México' ». [Date de consultation : 9 juill. 2019]
Citizen Lab. 27 novembre 2018. John Scott-Railton et al. « Reckless VI: Mexican Journalists Investigating Cartels Targeted with NSO Spyware Following Assassination of Colleague ». [Date de consultation : 25 juill. 2019]
États-Unis (É.-U.). 19 avril 2013. Department of State. « Mexico ». Country Reports on Human Rights Practices for 2012. [Date de consultation : 19 juill. 2019]
États-Unis (É.-U.). 25 février 2009. Department of State. « Mexico ». Country Reports on Human Rights Practices for 2008. [Date de consultation : 22 juill. 2019]
International Business Times (IBTimes). 25 avril 2016a. Jason Murdock. « Mexican Voter Database Containing 93.4 Million Records Leaks Online ». [Date de consultation : 12 juill. 2019]
International Business Times (IBTimes). 25 avril 2016b. Jason Murdock. « Mexico Election Hack: Political Party Behind Leak of 93.4 Million Voter Records? ». [Date de consultation : 12 juill. 2019]
International Business Times (IBTimes). S.d. « About Us ». [Date de consultation : 29 juill. 2019]
La Jornada. 7 janvier 2019. Dennis A. García. « Comisión Nacional de Seguridad Adeuda 10 mil mdp de Viáticos ». [Date de consultation : 31 juill. 2019]
Mexico News Daily. 22 avril 2016. « Massive Data Breach Reveals Voter Info ». [Date de consultation : 11 juill. 2019]
Mexique. Octobre 2018. Secretaría de Gobernación (SEGOB), Comisionado Nacional de Seguridad (CNS). Libro Blanco del Programa Presupuestario R903 "Plataforma México". [Date de consultation : 19 juill. 2019]
Mexique. 2018. Decreto por el que se reforman, adicionan y derogan diversas disposiciones de la Ley Orgánica de la Administración Pública Federal. [Date de consultation : 26 juill. 2019]
Mexique. 2015. Acuerdo Mediante el Cual el Pleno del Instituto Federal de Telecomunicaciones Expide los Lineamientos de Colaboración en Materia de Seguridad y Justicia y Modifica el Plan Técnico Fundamental de Numeración, Publicado en el Diario Oficial de la Federación el 21 de Junio de 1996. Diario Oficial de la Federación. [Date de consultation : 25 juill. 2019]
Mexique. Octobre 2008. Secretaría de Seguridad Pública (SSP). « Plataforma México: Sistema de interconexión para la generación de inteligencia operativa ». [Date de consultation : 9 juill. 2019]
Red en Defensa de los Derechos Digitales (R3D). 2018. ¿Quién No Defiende Tus Datos? [Date de consultation : 11 juill. 2019]
Reporte Indigo. 23 novembre 2015. Julio Ramírez. « Plataforma México en 'Off' ». [Date de consultation : 12 juill. 2019]
San Luis Potosí. S.d. Secretariado Ejecutivo del Consejo Estatal de Seguridad Pública. « Plataforma México ». [Date de consultation : 9 juill. 2019]
The Times of Israel. 28 novembre 2018. « Israeli Spyware Said Used by Mexican Government to Target Dissident Journalists ». [Date de consultation : 25 juill. 2019]
Vanguardia pour El Universal. 7 décembre 2018. « Busca AMLO 'revivir' a la Plataforma México; tiene 'secretos' del crimen ». [Date de consultation : 12 juill. 2019]
Autres sources consultées
Sources orales : cabinet de droit à Mexico ayant pour domaine de pratique le droit relatif à la protection de la vie privée; États-Unis – Department of State, Drug Enforcement Administration; Mexique – ambassade à Ottawa, Police fédérale; universitaire qui mène des recherches sur les cartels au Mexique; universitaires qui mènent des recherches sur les enjeux en matière de sécurité au Mexique.
Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Amnesty International; Committee to Protect Journalists; Council on Foreign Relations; El Universal; Factiva; Freedom House; The Guardian; Human Rights Watch; Milenio; Nations Unies – Office contre la drogue et le crime; The New York Times; Organisation de coopération et de développement économiques; Organisation des États américains; Privacy International; Proceso; Redalyc; Time; The Washington Post.