Réponses aux demandes d'information

​​​Les réponses aux demandes d’information (RDI) sont des rapports de recherches sur les conditions dans les pays. Ils font suite à des demandes des décideurs de la CISR.

La base de données contient les RDI en français et anglais archivées depuis sept ans. Les RDI antérieures sont accessibles sur le site Web European Country of Origin Information Network.

Les RDI publiées par la CISR sur son site Web peuvent contenir des documents annexés inaccessibles en raison de problèmes techniques et peuvent inclure des traductions de documents initialement rédigées dans d'autres langues que l'anglais ou le français. Pour obtenir une copie d'un document annexé et/ou une version traduite des documents annexés de RDI, veuillez en faire la demande par courriel.

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Les réponses aux demandes d'information (RDI) citent des renseignements qui sont accessibles au public au moment de leur publication et dans les délais fixés pour leur préparation. Une liste de références et d'autres sources consultées figure dans chaque RDI. Les sources citées sont considérées comme les renseignements les plus récents accessibles à la date de publication de la RDI.    

Les RDI n'apportent pas, ni ne prétendent apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile donnée. Elles visent plutôt à appuyer le processus d'octroi de l'asile. Pour obtenir plus de renseignements sur la méthodologie utilisée par la Direction des recherches, cliquez ici.   

C'est aux commissaires indépendants de la CISR (les décideurs) qu'il incombe d'évaluer les renseignements contenus dans les RDI et de décider du poids qui doit leur être accordé après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties.    

Les renseignements présentés dans les RDI reflètent uniquement les points de vue et les perspectives des sources citées et ne reflètent pas nécessairement la position de la CISR ou du gouvernement du Canada.    

31 mars 2016

CMR105449.EF

Cameroun : information indiquant si un commissaire à l’assermentation ou un notaire public légaliserait une déclaration ou signerait un affidavit concernant l’orientation sexuelle d’une personne; information sur la documentation déposée par la police à la suite d’une arrestation pour relations sexuelles entre personnes du même sexe (2014-mars 2016)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Affidavits concernant l’orientation sexuelle

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant du Réseau des défenseurs des droits humains de l’Afrique centrale (REDHAC), un réseau d’ONG vouées à la défense des droits de la personne dans huit pays de l’Afrique centrale, dont le Cameroun, qui milite pour la libération des défenseurs des droits de la personne emprisonnés (REDHAC s.d.), a déclaré qu’une personne ne peut manifester ouvertement son orientation sexuelle parce que l’homosexualité est illégale au Cameroun, suivant le code pénal (ibid. 22 mars 2016). Aux termes de l’article 347 bis du Code pénal,

[e]st punie d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 20 000 à 200 000 francs [CFA -- environ 450 $ CAN] toute personne qui a des rapports sexuels avec une personne de son sexe (Cameroun 1967, art. 347 bis).

Selon le représentant du REDHAC, au Cameroun, le fait de reconnaître avoir eu des relations homosexuelles reviendrait à [traduction] « se condamner aux yeux de la loi » et entraînerait le rejet de la personne par sa famille (REDHAC 22 mars 2016). La même source a signalé que les personnes LGBT au Cameroun n’admettent jamais de plein gré leur orientation sexuelle en cour ou à la police (ibid.). De même, dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un avocat camerounais qui défend les droits des personnes LGBT a déclaré ce qui suit :

[traduction]

Il est presque impossible [pour une personne LGBT] d’obtenir un affidavit concernant son orientation sexuelle, car la société estime encore que cette pratique est taboue (avocat 27 mars 2016).

Au cours d’un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, le président de l’Association camerounaise pour la défense des droits de l’homme, des libertés et du bien-être (ACADEHLIB), une ONG camerounaise qui dénonce les violations des droits de la personne et organise des conférences sur des questions liées aux droits de la personne (Portail humanitaire s.d.), a affirmé ce qui suit :

[traduction]

Au Cameroun, il est extrêmement rare qu’un avocat ou un notaire public signe une déclaration ou un affidavit dans lequel une personne déclare qu’elle est bisexuelle ou homosexuelle (ou qu’elle est au courant de l’orientation sexuelle d’un tiers), parce que personne ne fait ce genre de déclaration et que, en signant ce type de déclaration, l’avocat ou le notaire risquerait d’être lui-même considéré comme un homosexuel, ce qui est punissable par la loi (ACADEHLIB 24 mars 2016).

De même, d’après l’avocat,

[traduction]

[i]l est peu courant, sinon impossible, […] qu’un avocat ou un notaire public, et plus particulièrement un commissaire à l’assermentation, certifie l’authenticité d’une déclaration ou signe un affidavit dans lequel une personne jure qu’elle est bisexuelle ou homosexuelle, ou qu’elle est au courant de l’orientation sexuelle d’un tiers (avocat 27 mars 2016).

La même source a ajouté ce qui suit :

[traduction]

Au Cameroun, le commissaire à l’assermentation est un fonctionnaire et, étant donné que l’homosexualité est illégale au Cameroun, […] il ne peut légaliser une déclaration ou un affidavit dans lequel une personne jure être homosexuelle ou bisexuelle (ibid.).

D’après l’avocat, [traduction] « [c]ertains avocats ou notaires publics […] (si on leur versait une somme considérable) courraient le risque et certifieraient de telles déclarations ou affidavits avec réticence ou dédain » (ibid.). Il a ajouté que, en ce moment, il y a trois avocats au Cameroun qui [traduction] « pourraient certifier de telles déclarations ou affidavits [de leur plein gré] parce que les trois défendent les droits des personnes LGBTI, et il semblerait qu’ils soient disposés à assumer les risques encourus » (ibid.).

Dans un rapport de mission d’enquête sur l’homophobie et la violence exercées contre les défenseurs des droits des personnes LGBT au Cameroun, l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) précisent que le Barreau du Cameroun compte 2 500 membres et affirment ce qui suit :

[version française de la FIDH et de l’OMCT]

L’homophobie ambiante et institutionnalisée influence l’opinion et la position des avocats camerounais, si bien que les 4 ou 5 d’entre eux qui acceptent de défendre les personnes poursuivies pour actes homosexuels sont eux-mêmes stigmatisés par leurs confrères et par la société (FIDH et OMCT févr. 2015, 23).

D’après la même source, [version française de la FIDH et de l’OMCT] « [c]es avocats, défenseurs des droits des personnes LGBTI, sont régulièrement menacés, et le harcèlement à leur encontre s’est systématisé en 2012 » (ibid.). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, l’avocat a déclaré qu’il y avait seulement trois avocats, dont lui-même, qui étaient disposés à défendre les personnes LGBT au Cameroun et que [traduction] « tous les trois ont reçu et reçoivent encore des menaces de mort » (avocat 27 mars 2016).

Selon le président de l’ACADEHLIB, dans les rares cas où des personnes LGBT ont signé des déclarations relatives à leur orientation sexuelle, il s’agissait d’une [traduction] « fraude » faisant en sorte que la personne LGBT « a signé une déclaration contre son gré » (ACADEHLIB 24 mars 2016). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

2. Documentation déposée par la police à la suite d’une arrestation pour relations sexuelles entre personnes du même sexe

L’article 124 du Code de procédure pénale est libellé ainsi :

  1. L’[o]fficier de [p]olice [j]udiciaire mentionne au procès-verbal les motifs de la garde à vue et les repos qui ont séparé les interrogatoires, le jour et l’heure à partir desquels il a été soit libéré, soit conduit devant le Procureur de la République.
  2. Les mentions prévues à l’alinéa 1er doivent être visées par le suspect dans les formes prescrites […]. En cas de refus, l’[o]fficier de [p]olice [j]udiciaire en fait mention au procès-verbal (Cameroun 2005).

Toutefois, d’après l’avocat, l’article 124 du Code procédure pénale n’est pas toujours appliqué dans les affaires ayant trait aux personnes LGBT, [traduction] « qui sont souvent traitées comme des parias » (avocat 27 mars 2016). La même source a ajouté ce qui suit :

[traduction]

Peu importe qu’une personne LGBT mentionne ou non son orientation sexuelle, le rapport de police est souvent définitif ou concluant, et de tels rapports sont estampillés ou signés par la police (ibid.).

D’après les déclarations faites par deux sources orales, la police au Cameroun recourt souvent à la violence physique pour forcer une personne arrêtée à signer le rapport de police (ACADEHLIB 24 mars 2016; REDHAC 22 mars 2016). Le représentant du REDHAC a expliqué que la police [traduction] « obtient souvent des aveux [d’homosexualité] au moyen de la torture et d’autres traitements inhumains et dégradants » (ibid.).

La même source a précisé qu’une personne arrêtée pour avoir eu des relations homosexuelles ne peut obtenir le rapport d’enquête, mais que son avocat peut en recevoir une copie s’il en fait la demande (ibid.). De même, l’avocat a signalé ce qui suit au sujet du rapport :

[traduction]

[Il] n’est pas remis au suspect, qu’il s’agisse d’une personne LGBT ou non, sauf dans le cas des procédures liées à [une enquête préliminaire], où la documentation peut, si l’avocat de la défense en fait la demande, être mise à sa disposition au nom du suspect (avocat 27 mars 2016).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Association camerounaise pour la défense des droits de l’homme, des libertés et du bien-être (ACADEHLIB). 24 mars 2016. Entretien téléphonique avec le président.

Avocat, The Time Law Firm, Cameroun. 27 mars 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Cameroun. 2005. Law N°2005 of 27 July 2005 on the Criminal Procedure Code. <https://www.unodc.org/res/cld/document/criminal-procedre-code_html/Cameroon_Criminal_Procedure_Code_2005.pdf> [Date de consultation : 29 mars 2016]

_____. 1967. Code pénal. Loi n° 67/LF/1 du 12 Juin 1967. <http://www.vertic.org/media/National%20Legislation/Cameroon/CM_Code_Penal_Cameroun.pdf> [Date de consultation : 24 mars 2016]

Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) et Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Février 2015. Cameroon: Homophobia and Violence Against Defenders of the Rights of LGBTI Persons. <https://www.fidh.org/IMG/pdf/report_cameroun_lgbti_eng_final.pdf> [Date de consultation : 24 mars 2016]

Portail humanitaire. S.d. « Association camerounaise pour la défense des droits de l’homme, des libertés et du bien-être ». <http://www.portail-humanitaire.org/annuaire/infos/association/> [Date de consultation : 24 mars 2016]

Réseau des défenseurs des droits humains de l’Afrique centrale (REDHAC). 22 mars 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

_____. S.d. « Maximilienne Ngo Mbe parle du Redhac ». <http://www.redhac.org/interne.php?page=article.php&idmenu=49&idsmenu=137&idarticle=232> [Date de consultation : 24 mars 2016]

Autres sources consultées

Sources orales : Aids-ACODEV-Cam; Alternatives-Cameroun; Association pour la défense des homosexuel(le)s; Avocats sans frontières Cameroun; Maison des droits de l’homme du Cameroun.

Sites Internet, y compris : Amnesty International; ecoi.net; Freedom House; Human Rights Watch; Nations Unies – Refworld.



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