Chine : information indiquant si les immolations du 23 janvier 2001 à la place Tiananmen sont un coup monté; le cas échéant, information indiquant qui a fait les allégations et en fonction de quelles preuves (2001-novembre 2004)
Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Ottawa
Les porte-parole du Falun Gong nient fermement l'allégation selon laquelle les personnes qui ont tenté de s'immoler le 23 janvier 2001 sur la place Tiananmen étaient des membres du mouvement, comme l'ont rapporté les médias chinois (CNN.com 24 janv. 2001; AFP 31 janv. 2001; Schechter 2001, 20). À la suite de la publication d'un communiqué sur l'incident par l'agence de nouvelles Xinhua le 23 janvier 2001, le Falun Gong a déclaré que [traduction] « [c]ette soi-disant tentative de suicide sur la place Tiananmen n'a rien à voir avec les pratiquants du Falun Gong, car il est contraire aux enseignements du Falun Gong de porter atteinte à la vie » (CNN.com 24 janv. 2001).
Dans l'enregistrement vidéo de l'incident, produit par la New Tang Dynasty (NTD) TV, une station de télévision chinoise privée (Clearwisdom.net 13 nov. 2003), on note que l'incident du 23 janvier 2001 a été [traduction] « l'événement le plus publicisé » utilisé par le gouvernement chinois pour [traduction] « persécuter » les pratiquants du Falun Gong et pour [traduction] « tourner l'opinion publique contre le mouvement » (NTD TV 2001). NTD TV a également procédé à une analyse des images de l'incident diffusées par la chaîne de télévision de l'État chinois, soit la China Central Television (CCTV). Voici les éléments de l'enregistrement vidéo que ses auteurs invoquent comme preuve que les immolations sont une conspiration :
[traduction]
- le jour des immolations, les policiers transportaient 25 pièces d'équipement de lutte contre les incendies alors qu'habituellement, ils ne transportent pas d'extincteurs pendant qu'ils patrouillent la place Tiananmen.
- une des femmes s'étant immolée, Liu Chunling, semble être frappée sur la tête par un objet contondant pendant que les policiers tentent d'éteindre le feu. Dans l'enregistrement, on apprend que Liu est décédée des suites d'un coup sévère à la tête.
- la caméra fait un zoom sur la scène qui se déroule. Cependant, les caméras de surveillance de la place Tiananmen sont fixes. Les auteurs de l'enregistrement vidéo rejettent l'allégation des médias chinois selon laquelle l'incident a été filmé par CNN, puisque les caméramans de CNN ont été arrêtés et leur équipement, confisqué, avant l'incident.
- l'homme s'étant immolé, Wang Jindong, crie des commentaires qui, selon NTD TV, vont à l'encontre des enseignements du Falun Dafa. Toujours selon le groupe, sa position assise ne reflète pas la position de lotus ou de demi-lotus enseignée par le Falun Dafa.
- les soins prodigués aux victimes à l'hôpital, comme l'ont constaté les médias de l'État chinois, ne correspondent pas aux soins normalement prodigués aux personnes ayant subi des brûlures sévères. Par exemple, les chambres des patients n'étaient pas stériles. De plus, la fille qui a supposément subi une trachéotomie était en mesure de parler et de chanter clairement quelques jours seulement après l'opération (NTD TV 2001; voir aussi WOIPFG août 2003).
Les producteurs de l'enregistrement vidéo soulignent également qu'avant le 23 janvier 2001, il n'y a eu aucun incident d'immolation parmi les pratiquants du Falun Gong nulle part dans le monde (2001).
L'interruption, par le Falun Gong, de la programmation télévisuelle en Chine pour la mise en ondes d'un enregistrement vidéo de l'incident des immolations du 23 janvier 2001 a commencé au début de l'année 2002 (AFP 11 juill. 2002; voir aussi AFP 7 mars 2002 et New York Times 5 avr. 2002). Dans le vidéo diffusé en mars 2002 dans la ville de Changchun, dans le Nord-Est, on prétendait que l'incident des immolations avait été fabriqué par le gouvernement chinois (New York Times 5 avr. 2002; voir aussi AFP 7 mars 2002). Des vidéos semblables ont aussi été diffusés dans les provinces de Liaoning et de Sichuan (ibid. ). L'Agence France Presse (AFP) a indiqué, dans un article du 11 juillet 2002 que, dans le but de répandre son message dénonçant la [traduction] « persécution » de ses membres, le Falun Gong utilisait le téléphone, le télécopieur et l'Internet et interrompait des programmes télévisés chinois. L'un des principaux objectifs de la campagne, selon l'AFP, était de renseigner les gens sur les immolations de janvier 2001 (11 juillet 2002).
L'Organisation mondiale d'enquête sur la persécution du Falun Gong (World Organization to Investigate the Persecution of Falun Gong - WOIPFG), mise sur pied en janvier 2003 (WOIPFG s.d.), a soi-disant procédé à [traduction] « des enquêtes et des suivis complets, objectifs et indépendants » de l'incident, ce qui comprenait une analyse de vérification du locuteur des trois émissions de CCTV où Wang Jindong est interviewé (août 2003). Selon la WOIPFG, le laboratoire d'analyse des tonalités de voix de l'Université nationale de Taïwan (National Taiwan University Speech Processing Laboratory), qui a procédé à l'analyse, a conclu que [traduction] « le Wang Jindong qui apparaît dans l'entrevue de la première émission Focus Interview n'est pas la même [personne] que le Wang Jindong qui apparaît dans les deuxième et troisième émissions » (s.d.; voir aussi WOIPFG 19 avr. 2003). Cette preuve, fait valoir la WOIPFG, confirme que quelqu'un s'est fait passer pour Wang Jindong (s.d.). La WOIPFG prétend également avoir reçu [traduction] « des renseignements fiables d'une source à l'intérieur du gouvernement chinois et du Bureau de la police [à l'effet que] l'incident était un coup monté pour diffamer le Falun Gong » (s.d.).
Dans son livre sur le Falun Gong, le journaliste Danny Schechter écrit que les immolations du 23 janvier 2001 [traduction] « ressemblent [...] à un incident monté de toutes pièces et exploité de façon flagrante pour des raisons politiques » (2001, 24). Il cite un journaliste de télévision de l'Associated Press qui dit que [traduction] « [...] cette manière de faire est typique en Chine; fabriquer un événement cette année pour servir ses propres intérêts » (Schechter 2001, 21).
Voici un extrait d'une déclaration officielle sur les immolations, faite par un porte-parole de Falun Gong aux États-Unis et reproduite dans le livre Falun Gong's Challenge to China :
[traduction]
[n]ous en savons toujours très peu sur les circonstances entourant l'incident. Personne ne sait ce qui est arrivé la semaine suivant l'incident et avant que les médias chinois publient leurs articles et diffusent leurs programmes télévisés parfaitement montés. Il ne faut pas oublier que le régime chinois contrôle de si près chaque aspect de ce cas qu'aucune des allégations de Xinhua n'a été corroborée par des sources indépendantes (Schechter 2001, 21).
Human Rights Watch (HRW), dans un rapport sur le Falun Gong de janvier 2002, soulignait que [traduction] « [...] certaines questions sur l'incident [du 23 janvier 2001], comme de savoir si les pratiquants étaient impliqués [...] ne sont toujours pas résolues ». Lors d'un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, le 23 novembre 2004, le chercheur principal sur la Chine pour HRW a affirmé qu'il aurait été impossible pour des organisations indépendantes de mener une enquête sur l'incident. Il a déclaré qu'à l'époque, cet incident a constitué l'un des événements les plus difficiles à couvrir pour les journalistes de Beijing en raison du peu d'informations disponibles et des difficultés à vérifier l'étendue du contrôle de l'information (23 nov. 2004). Le Washington Post a indiqué, dans un article du 4 février 2001, que le gouvernement chinois a refusé les demandes des médias visant à interviewer les survivants des immolations. Dans son enregistrement vidéo, NTD TV a fait remarquer que seuls les médias de l'État chinois ont pu s'entretenir avec les survivants (2001). D'après M. Schechter, les vidéocassettes des caméramans de CNN ont été confisquées au moment de l'incident et n'ont jamais été diffusées (Schechter 2001, 20).
Toutefois, un article du New York Times du 5 avril 2002 signalait que les autorités chinoises avaient, pour la première fois, [traduction] « permis à un petit groupe de journalistes étrangers de parler à six personnes impliquées » dans les immolations du 23 janvier 2001, [traduction] « incluant les trois personnes qui se sont immolées par le feu ». En la présence des autorités, les [traduction] « immolateurs » ont insisté sur le fait qu'ils n'était pas des [traduction] « complices du gouvernement », mais plutôt des pratiquants de longue date du Falun Gong. L'un d'eux a exécuté des exercices du Falun Gong à la demande d'un journaliste, et un autre, Wang Jindong, a parlé des bienfaits pour la santé associés à cette pratique (New York Times 5 avr. 2002). Le journal a indiqué que les entrevues semblaient être une tentative de la part du gouvernement de contrer les efforts déployés par le Falun Gong depuis le début de l'année 2002 pour [traduction] « promouvoir [...] ses croyances et sensibiliser le public [...] à sa persécution en Chine » (ibid. ). Mais, toujours selon l'article, [traduction] « [a]vec la propagande provenant des quatre coins de l'univers, les allégations contradictoires sont difficiles à évaluer » (ibid. ).
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous la liste des autres sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.
Références
Agence France Presse (AFP). 11 juillet 2002. « Falungong Using Phones, Faxes, Internet to Directly Reach Chinese ». (FBIS-CHI-2002-0711 15 juill. 2002/WNC)
_____. 7 mars 2002. « Deux films produits par le Falungong montrés à la télévision chinoise ». (Courrier AFP)
_____. 31 janvier 2001. « Falungong Denies Tiananmen Suicide Group Were Genuine Followers ». <http://www.cesnur.org/2001/falun_jan11.htm> [Date de consultation : 6 déc. 2004]
CNN.com. 24 janvier 2001. Rebecca MacKinnon. « Falun Gong Denies Tie to Self-Immolation Attempts ». <http://archives.cnn.com/2001/ASIANOW/east/01/23/china.falungong.03/> [Date de consultation : 6 déc. 2004]
Falun Dafa Clearwisdom.net. 13 novembre 2003. « 'Self-Immolation' Analysis Movie Wins Columbus International Film & Video Festival Award ». <http://www.clearwisdom.net/emh/articles/2003/11/14/42247.html> [Date de consultation : 16 déc. 2004]
Human Rights Watch, New York. 23 novembre 2004. Entrevue téléphonique avec le chercheur principal sur la Chine.
_____. Janvier 2002. « Dangerous Meditation: China's Campaign Against Falungong ». <http://www.hrw.org/reports/2002/china/index.htm> [Date de consultation : 19 nov. 2004]
New Tang Dynasty (NTD) TV. 2001. False Fire: China's Tragic New Standard in State Deception. Disque numérique polyvalent (DVD).
The New York Times . 5 avril 2002. Elisabeth Rosenthal. « Former Falun Gong Followers Enlisted in China's War on Sect ». (NEXIS)
Schechter, Danny. 2001. Falun Gong's Challenge to China: Spiritual Practice or "Evil Cult"? New York: Akashic Books.
The Washington Post . 4 février 2001. Philip P. Pan. « Human Fire Ignites Chinese Mystery; Motive for Public Burning Intensifies Fight over Falun Gong ». (NEXIS)
World Organization to Investigate the Persecution of Falun Gong (WOIPFG). Août 2003. « Second Investigation Report on the 'Tiananmen Square Self-Immolation Incident' ». <http://www.upholdjustice.org/English.2/S_I_second_report.htm> [Date de consultation : 22 nov. 2004]
_____. 19 avril 2003. « Report on Speaker Verification: National Taiwan University Speech Processing Laboratory ». <http://www.upholdjustice.org/English.2/speaker_verification.pdf> [Date de consultation : 22 nov. 2004]
_____. s.d. « New Evidence Confirms Alleged Falun Gong 'Tiananmen Square Self-Immolation' Was a State Conspiracy ». <http://www.upholdjustice.org/English.2/new_evidence.doc> [Date de consultation : 22 nov. 2004]
Autres sources consultées
Sources orales : Human Rights in China.Trois sources orales n'ont pas fourni l'information dans les délais prescrits pour cette réponse.
Sites Internet, y compris : Amnesty International, BBC, Center for Religious Freedom (Freedom House), Center for Studies on New Religions, Clearwisdom, CNN.com, Weatherhead East Asian Institute (Columbia University).