Les présentes instructions sont données par le président de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada (la
CISR, ou la Commission), et prennent effet à la date à laquelle elles sont signées.Note 1
Les présentes instructions traitent de la question du « secret professionnel de l'avocat » et décrivent la position de la
CISR en ce qui a trait au maintien de la confidentialité des avis juridiques qu'elle reçoit de ses Services juridiques. Les Instructions s'appliquent à la divulgation des avis juridiques, tant à la
CISR qu'à l'extérieur de celle-ci.
Le « secret professionnel de l'avocat » — que l'on appelle aussi parfois le « privilège de la consultation juridique » ou le « privilège avocat-client » — est le privilège, dont jouit le client, de non-divulgation de l'avis juridique qu'il reçoit de son avocat. Le client peut décider de renoncer à ce privilège et de permettre la divulgation de l'avis juridique. En revanche, l'avocat a l'obligation déontologique de ne pas divulguer l'avis juridique qu'il donne à son client, à moins que ce dernier ait consenti à cette divulgation.
Dans l'arrêt
Pritchard
c. Ontario (Commission des droits de la personne)Note 2, la Cour suprême du Canada a résumé e la façon suivante les principes applicables au secret professionnel de l'avocat :
- Les critères permettant d'établir l'existence du secret professionnel de l'avocat [privilège avocat-client] sont les suivants : il doit s'agir (i) d'une communication entre un avocat et son client; (ii) qui comporte une consultation ou un avis juridiques; et (iii) que les parties considèrent de nature confidentielle.
- Le privilège ne s'étend
pas aux communications : qui n'ont trait ni à la consultation juridique ni à l'avis donné; qui ne sont pas censés être confidentiels; ou qui visent à faciliter un comportement illégal.
- Généralement, le secret professionnel de l'avocat s'applique dans la mesure où la communication s'inscrit dans le cadre habituel et ordinaire de la relation professionnelle.
- À une certaine époque, le privilège ne s'appliquait qu'aux communications intervenues au cours d'un litige, mais il s'est ensuite appliqué à toute consultation juridique sur une question litigieuse ou non.
- Le secret professionnel de l'avocat doit être aussi absolu que possible pour assurer la confiance du public et demeurer pertinent. Ce privilège est fondamental pour le système de justice canadien. La notion selon laquelle une personne doit pouvoir parler franchement à son avocat pour qu'il soit en mesure de la représenter pleinement est au cœur de ce privilège.
- Le secret professionnel de l'avocat s'applique lorsqu'un avocat salarié de l'état donne un avis à son client, l'organisme gouvernemental. Toutefois, à l'instar des conseils donnés par un avocat d'affaires à titre de gestionnaire ou autrement qu'en qualité de juriste, les conseils donnés par un avocat du gouvernement au sujet de questions de politique générale qui n'ont rien à voir avec ses compétences en droit ne jouissent pas de la protection du privilège.
- Le secret professionnel de l'avocat vise tant l'avis donné à un organisme administratif par un avocat salarié que l'avis donné dans le contexte de l'exercice privé du droit. Lorsqu'un avocat salarié donne des conseils que l'on qualifierait de privilégiés, le fait qu'il est un avocat « interne » n'écarte pas l'application du privilège ni n'en modifie la nature.
Les Services juridiques de la
CISR assument le rôle d'« avocat d'affaires » auprès de la Commission. Le client des Services juridiques de la
CISR est la
CISR. Les Services juridiques donnent des avis aux commissaires et aux membres du personnel pour aider ceux-ci dans le cadre de l'exercice des fonctions qui leur incombent en vertu de la
Loi sur l'immigration et la protection des réfugiésNote 3 ou d'autres lois relatives au fonctionnement du gouvernement, comme la
Loi sur l'emploi dans la fonction publique, la
Loi sur la gestion des finances publiques et la
Loi sur les langues officielles. Les avis juridiques sont donnés aux commissaires et au personnel en leur qualité officielle, et non à titre personnel.
Les conseillers juridiques qui travaillent à la
CISR sont des membres en règle d'un barreau provincial. À ce titre, ils ont l'obligation déontologique de garder le plus grand secret sur ce qu'ils apprennent des affaires et des activités de leur client (la
CISR) au cours de leurs rapports professionnels. Les avocats ne peuvent rien divulguer, sauf si la
CISR y consent expressément ou tacitement ou si la loi l'ordonneNote 4.
En vertu de la
LIPR, le président est le premier dirigeant de la Commission ainsi que membre d'office de chaque section. À ce titre, le président assure la direction et contrôle la gestion des activités et du personnel de la Commission. La
LIPR autorise le président à déléguer les pouvoirs que lui confère cette loiNote 5.
Selon la
Loi sur l'accès à l'information (LAI), le responsable d'une institution fédérale peut refuser la communication de documents demandés en vertu de cette loi et contenant des renseignements protégés par le secret professionnel qui lie un avocat à son clientNote 6.
La
Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP) comporte une disposition analogue relative à la communication de tout renseignement personnel protégé par le secret professionnel qui lie un avocat à son clientNote 7.
Ainsi, il ressort clairement de la
LAI, de la
LPRP et de la
LIPR que le président, ou son délégataire, a le pouvoir de décider de refuser la divulgation d'un avis juridique donné à la
CISR au titre du secret professionnel de l'avocat.
Depuis sa création en 1989, la
CISR a toujours considéré que les communications entre ses conseillers juridiques et le reste de la Commission étaient la propriété de la
CISR et que ces communications ne devaient pas être divulguées à l'extérieur de la Commission, à moins que la direction de la
CISR prenne la décision de renoncer au secret professionnel de l'avocat.
Bien que le secret professionnel de l'avocat protège les avis juridiques donnés par les Services juridiques de la
CISR contre la divulgation à quiconque
à l'extérieur de la Commission, il est loisible à la
CISR d'élaborer une politique concernant la divulgation de ces avis juridiques
au sein de la Commission.
La Commission a pour mission de « régler, de manière efficace, équitable et conforme à la loi, les cas d'immigration et de statut de réfugié ». Compte tenu de cet énoncé de mission, le président souhaite encourager les commissaires à ne pas hésiter à consulter les conseillers juridiques chaque fois qu'ils estiment nécessaire ou utile d'obtenir un avis juridique. En conséquence, outre le fait que les communications entre les différents commissaires et les Services juridiques sont protégées par le secret professionnel de l'avocat contre toute divulgation
à l'extérieur de la Commission, les instructions qui suivent prévoient que, même
au sein de la Commission, les communications entre les différents commissaires en leur qualité de décideur d'une part et les Services juridiques d'autre part doivent être traitées comme confidentielles.
Quant aux avis juridiques donnés au personnel, les communications avec les Services juridiques continueront à ne pas être traitées comme confidentielles au sein de la Commission, mais ces communications demeureront protégées par le secret professionnel de l'avocat, et elles ne devront pas être divulguées à l'extérieur de la Commission sans autorisation appropriée.
Les présentes instructions s'appliquent à la divulgation des avis juridiques donnés par les Services juridiques de la
CISR.
Lorsqu’un commissaire de la CISR demande un avis juridique relativement à son travail à la Commission en qualité de décideur, y compris relativement à la tenue d’une audience ou à la rédaction des motifs d’une décision, la CISR traite cet avis juridique comme une communication confidentielle entre le commissaire en question et les Services juridiques de la CISR. En d’autres mots, les Services juridiques de la CISR ne divulguent pas à la direction de la CISR la communication entre le commissaire et les Services juridiques. Les commissaires peuvent communiquer l’avis donné par les Services juridiques aux autres commissaires, y compris les commissaires gestionnaires, s’ils le souhaitent.
Cependant, compte tenu des intérêts généraux de la Commission, cette attente de confidentialité fait l’objet d’une exception en cas de manquement grave au Code de déontologie des commissaires de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du CanadaNote 8.
En outre, la formation de nouveaux commissaires et la formation corrective à l’intention de commissaires expérimentés constituent des situations particulières et, dans ce contexte, les avis juridiques ne sont pas traités comme confidentiels au sein de la Commission. Dans ces situations, les avis juridiques peuvent être divulgués, dans une certaine mesure, pour déterminer les besoins en matière de formation et de perfectionnement professionnel à des fins d’évaluation du rendement d’un nouveau commissaire ou à d’autres fins, tel qu’il est mentionné dans la Politique de révision des motifs de la CISR.
Lorsqu’un membre du personnel de la CISR demande un avis juridique sur quelque sujet que ce soit, les Services juridiques ne divulguent pas cet avis juridique à l’extérieur de la CISR sans autorisation, puisque les principes relatifs au secret professionnel de l’avocat s’y appliquent; toutefois, les Services juridiques ne traitent pas cet avis juridique comme une communication confidentielle au sein de la CISR, et ils peuvent le divulguer à la direction de la CISR.
Seul le président, ou son délégataire, a le pouvoir de renoncer au secret professionnel de l’avocat et de permettre la divulgation d’un avis juridique donné à la CISR auquel s’applique le privilège.
Il est de bonne pratique de consulter les Services juridiques de la CISR avant de prendre toute décision relative à une renonciation au secret professionnel de l’avocat. Les Services juridiques seront ainsi en mesure de conseiller quant à toute conséquence défavorable éventuelle, par exemple, si la divulgation risque d’être préjudiciable à la Commission dans le cadre d’une affaire en instance ou envisagée.