Réponses aux demandes d'information

​​​Les réponses aux demandes d’information (RDI) sont des rapports de recherches sur les conditions dans les pays. Ils font suite à des demandes des décideurs de la CISR.

La base de données contient les RDI en français et anglais archivées depuis sept ans. Les RDI antérieures sont accessibles sur le site Web European Country of Origin Information Network.

Les RDI publiées par la CISR sur son site Web peuvent contenir des documents annexés inaccessibles en raison de problèmes techniques et peuvent inclure des traductions de documents initialement rédigées dans d'autres langues que l'anglais ou le français. Pour obtenir une copie d'un document annexé et/ou une version traduite des documents annexés de RDI, veuillez en faire la demande par courriel.

Avertissement

Avertissement

Les réponses aux demandes d'information (RDI) citent des renseignements qui sont accessibles au public au moment de leur publication et dans les délais fixés pour leur préparation. Une liste de références et d'autres sources consultées figure dans chaque RDI. Les sources citées sont considérées comme les renseignements les plus récents accessibles à la date de publication de la RDI.    

Les RDI n'apportent pas, ni ne prétendent apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile donnée. Elles visent plutôt à appuyer le processus d'octroi de l'asile. Pour obtenir plus de renseignements sur la méthodologie utilisée par la Direction des recherches, cliquez ici.   

C'est aux commissaires indépendants de la CISR (les décideurs) qu'il incombe d'évaluer les renseignements contenus dans les RDI et de décider du poids qui doit leur être accordé après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties.    

Les renseignements présentés dans les RDI reflètent uniquement les points de vue et les perspectives des sources citées et ne reflètent pas nécessairement la position de la CISR ou du gouvernement du Canada.    

4 octobre 2012

RWA104195.EF

Rwanda : information indiquant si l’on a toujours recours aux juridictions gacaca; dans la négative, information sur les nouveaux mécanismes de résolution des litiges qui étaient de leur compétence (juillet 2010-septembre 2012)

Direction des recherches, Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Juridictions gacaca

Les juridictions gacaca sont des tribunaux communautaires qui ont été mis sur pied pour statuer sur les cas liés au génocide de 1994 (Nations Unies 2 juin 2011; BBC 18 juin 2012; Human Rights Watch 2011). Ces tribunaux ont été mis en place en 2001 (The Guardian 11 janv. 2012; RNW 21 juin 2012; Al Jazeera 19 juin 2012). Des sources signalent que les juridictions gacaca ont statué sur quelque deux millions de cas (The Independent 29 juin 2012; Nations Unies 18 juin 2012; The New Times 19 juin 2012).

2. Suppression des juridictions gacaca

Des sources précisent que la suppression des juridictions gacaca a été remise plusieurs fois (LDGL 19 sept. 2012; Human Rights Watch 2011). D’après diverses sources, les juridictions gacaca ont été supprimées le 18 juin 2012 (The Independent 29 juin 2012; Al Jazeera 19 juin 2012; LDGL 18 sept. 2012; Nations Unies 18 juin 2012). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un conférencier en politique comparative et internationale au Département des études orientales et africaines (School of Oriental and African Studies) de l’Université de Londres, auteur d’une monographie intitulée The Gacaca Courts, Post-Genocide Justice and Reconciliation in Rwanda: Justice Without Lawyers, a également souligné que les juridictions gacaca ont été supprimées en juin 2012 et a expliqué que

[traduction]

plus personne ne sera convoqué devant une juridiction gacaca. Les tribunaux ont été supprimés parce que le gouvernement du Rwanda considérait qu’ils avaient réglé leur nombre de cas en instance liés au génocide et, après une décennie d’activité, les tribunaux s’avéraient trop ardus pour la population du pays, qui jouait un rôle essentiel dans les juridictions gacaca, notamment celui de juge élu localement et de participant qui assistait aux audiences toutes les semaines. Le gouvernement a maintenant tourné son attention vers la collecte et la numérisation des millions de pages des dossiers des juridictions gacaca réunis pendant la durée des tribunaux (conférencier 13 sept. 2012).

La Direction des recherches n’a trouvé aucune autre source traitant des motifs précis de la suppression des juridictions gacaca allant en ce sens dans les délais fixés.

3. Mécanismes de résolution des litiges qui étaient de la compétence des juridictions gacaca

On peut lire dans le New Times, journal de langue anglaise de Kigali (The New Times 25 juin 2011), que, selon le président du Barreau de Kigali, les cas qui n’ont pas été réglés par les juridictions gacaca seront déférés aux tribunaux ordinaires (ibid. 19 juin 2012). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant de la Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL) a par ailleurs fait observer que la poursuite et la répression des infractions constitutives du crime de génocide, qui relevaient des juridictions gacaca, sont maintenant du ressort des tribunaux de grande instance, des tribunaux de base et des comités de médiation (LDGL 18 sept. 2012). Il y a 12 tribunaux de grande instance (Rwanda s.d.a), 60 tribunaux de base (ibid. s.d.b) et 2 150 comités de médiation dans l’ensemble du pays (ibid. s.d.c). D’après le site Internet de la Cour suprême, les compétences des tribunaux de grande instance et des tribunaux de base sont de matière pénale et civile (ibid. s.d.a; ibid. s.d.b). On peut lire sur le site Internet du ministère de la Justice que les comités de médiation [traduction] « ont compétence en matière d’affaires pénales et de litiges civils mineurs. En pratique, ils statuent généralement sur des cas liés à la terre, à la succession, à la famille, à la paternité, au mariage, à la violence conjugale, aux voies de fait simples et au vol » (ibid. s.d.c). Les comités de médiation, également appelés abunzi, ont été mis sur pied en 2006 (Rwanda s.d.d). Semblables aux juridictions gacaca, les comités de médiation ont été inspirés par le système traditionnel de résolution des litiges au Rwanda, [traduction] « particulièrement sous la forme de réunions familiales » (ibid.). Le Conseil de gouvernance du Rwanda (Rwanda Governance Board) souligne que les comités de médiation fournissent [traduction] « un cadre pour la médiation obligatoire avant d’engager des poursuites devant des juridictions ordinaires de première instance » (ibid.). Les comités de médiation visent à résoudre les litiges entre des personnes du même village ou de la même famille (ibid.). Ces tribunaux ont pour but de décentraliser la justice et la rendre accessible (ibid.; ibid. s.d.c). Selon le site Internet du ministère de la Justice, les comités de médiation se composent de bénévoles, et les services qu’ils offrent sont gratuits (ibid.).

La Loi organique no 04/2012/OL du 15/06/2012 portant suppression des juridictions Gacaca et fixant les mécanismes de résolution des litiges qui étaient de leur compétence prévoit que les actes « constitutifs du crime de génocide perpétré contre les Tutsi et autres crimes contre l’humanité » énumérés ci­après sont jugés au premier degré par le tribunal de grande instance :

  1. les infractions ou les actes de participation criminelle visant la planification, l’organisation, l’incitation, la supervision et l’encadrement du crime de génocide ou d’autres crimes contre l’humanité commis par une personne ainsi que ses complices;
  2. les actes constitutifs du crime de génocide perpétré contre les Tutsi et d’autres crimes contre l’humanité commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 par une personne qui, à cette époque, faisait partie des instances dirigeantes aux niveaux national et préfectoral ainsi que ses complices (Rwanda 2012, art. 4).

D’après la Loi, les infractions suivantes sont de la compétence du tribunal de base :

  1. les actes constitutifs du crime de génocide perpétré contre les Tutsi et d’autres crimes contre l’humanité commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 par une personne qui, à cette époque, faisait partie des instances dirigeantes au niveau sous-préfectoral ou communal : dans les instances administratives de l’État, les partis politiques, la police communale, les confessions religieuses ou les milices ou qui a encouragé les autres à les commettre, ainsi que ses complices;
  2. les actes de viol ou de tortures sexuelles commis par une personne ainsi que ses complices;
  3. l’homicide;
  4. actes de tortures;
  5. actes dégradants sur un cadavre;
  6. atteintes graves contre les personnes ayant entraîné la mort;
  7. blessures ou autres violences graves dans l’intention de donner la mort quand bien même ce but n’a pas été atteint;
  8. d’autres actes criminels commis contre des personnes, sans intention de donner la mort (ibid., art. 5).

L’article 6 de la Loi est ainsi libellé :

Nonobstant la valeur de l’objet du litige et l’adresse des parties, le pillage ou l’endommagement des biens commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994, qui étaient de la compétence des Juridictions Gacaca, relèvent de la compétence des Comités de Conciliateurs qui appliquent les lois régissant ces comités sans tenir en considération qu’ils soient commis par les civils, les gendarmes ou les militaires. Les auteurs sont sanctionnés de la restitution (ibid., art. 6).

Selon l’article 7 de la Loi :

Les actes constitutifs du crime de génocide perpétré contre les Tutsi et d’autres crimes contre l’humanité commis par un militaire ou un gendarme entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 qui étaient de la compétence des juridictions Gacaca sont jugées au premier degré par le Tribunal Militaire sauf ceux relatifs au pillage et à la destruction des biens (ibid., art. 7).

L’article 10 de la Loi prévoit que les jugements rendus par les juridictions gacaca peuvent faire objet de recours en révision auprès d’une « juridiction compétente » dans les cas suivants :

lorsque, après une condamnation définitive par une juridiction Gacaca pour homicide, la personne prétendue victime est retrouvée vivante;

lorsque qu’il y a eu condamnation définitive d’une personne par une juridiction Gacaca pour seul chef d’accusation l’infraction d’homicide, et que par la suite une autre personne se trouve condamnée pour la seule et même infraction sans qu’il y ait complicité entre les deux;

lorsque, après une décision définitive d’acquittement par une juridiction Gacaca, il est constaté au delà de tout doute raisonnable d’erreur qu’il existe des informations fiables recueillies au moment de la collecte des informations qui n’ont pas été connues au moment du jugement initial et qui pourtant prouvent la responsabilité pénale d’une personne;

lorsqu’une personne a été définitivement condamnée ou acquittée par une juridiction Gacaca, et qu’il apparaît que le siège de la juridiction Gacaca qui a rendu le jugement était corrompu tel que décidé par une juridiction compétente (ibid., art. 10).

Parmi les sources qu’elle a consultées, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur les cas liés au génocide portés devant les tribunaux susmentionnés.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l’aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n’apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d’une demande d’asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d’information.

Références

Al Jazeera. 19 juin 2012. « Rwanda Closes "Gacaca" Genocide Courts ». <http://www.aljazeera.com/news/Africa/2012/06/201261951733409260.html> [Date de consultation : 31 août 2012]

British Broadcasting Corporation (BBC). 18 juin 2012. « Rwanda "Gacaca" Genocide Courts Finish Work ». <http://www.bbc.co.uk/news/world-africa-18490348?print=true> [Date de consultation : 31 août 2012]

Conférencier, University of London, Royaume-Uni. 13 septembre 2012. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

The Guardian [Londres]. 11 janvier 2010. Homa Khaleeli. « Rwanda’s Community Courts: a Unique Experiment in Justice ». <http://www.guardian.co.uk/world/2010/jan/11/Rwanda-gacaca-courts/print> [Date de consultation : 31 août 2012]

Human Rights Watch. 2011. « Rwanda ». World Report 2011: Events of 2010. <http://www.hrw.org/world-report-2011/rwanda> [Date de consultation : 11 sept. 2012]

The Independent [Kampala, Ouganda]. 29 juin 2012. « Out of Session-Gacaca Courts Formally Close as President Kagame Scoffs at ICTR ». (Factiva)

Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL). 19 septembre 2012. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

_____. 18 septembre 2012. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

Nations Unies. 18 juin 2012. Auke Lootsma. « Les tribunaux chargés de juger le génocide achèvent leurs travaux au Rwanda ». <http://www.undp.org/content/undp/fr/home/presscenter/articles/2012/06/18/genocide-courts-finish-work-in-milestone-for-rwanda-s-healing/> [Date de consultation : 28 sept. 2012]

_____. 2 juin 2011. Réseaux d’information régionaux intégrés (IRIN). « Rwanda: Rape, Justice and Privacy ». <http://www.irinnews.org/printreport.aspx?reportid=92876> [Date de consultation : 14 sept. 2012]

The New Times [Kigali]. 19 juin 2012. « Rwandans Reflect on Gacaca as Trials Come to an End ». <http://www.newtimes.co.rw/news/index.php?i=15028&a=54971> [Date de consultation : 20 sept. 2012]

_____. 25 juin 2011. « About Us ». <http://www.newtimes.co.rw/news/index.php?action=Pages&page=5&t=About Us> [Date de consultation : 20 sept. 2012]

Radio Netherlands Worldwide (RNW). 21 juin 2012. Clive Muhenga. « Rwanda: Gacaca Courts Close but Genocide Wounds Still Open ». <http://allafrica.com/stories/printable/201206220254.html> [Date de consultation : 11 sept. 2012]

Rwanda. 2012. Organic Law No 04/2012/OL of 15/06/2012 Terminating Gacaca Courts and Determining Mechanisms for Solving Issues Which Were Under Their Jurisdiction. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant de la Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs.

_____. S.d.a. Supreme Court. « Intermediate Courts ». <http://www.supremecourt.gov.rw/sc/Supremecourt.aspx> [Date de consultation : 26 sept. 2012]

_____. S.d.b. Supreme Court. « Primary Courts ». <http://www.supremecourt.gov.rw/sc/Primarycourts.aspx> [Date de consultation : 26 sept. 2012]

_____. S.d.c. Ministry of Justice. « Mediation Committees ». <http://www.minijust.gov.rw/moj/mediationcommittees.aspx> [Date de consultation : 26 sept. 2012]

_____. S.d.d. Rwanda Governance Board (RGB). « Abunzi ». <http://www.rgb.rw/main-menu/innovation/abunzi.html> [Date de consultation : 2 oct. 2012]

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre des représentants des organismes suivants ont été infructueuses : Avocats sans frontières; Commission nationale des droits de la personne; Ibuka; Rwanda – ambassade du Rwanda à Washington, DC, Judiciary, Ministry of Justice, Office of the Ombudsman of Rwanda, Mission permanente de la République du Rwanda auprès de l’Organisation des Nations Unies, haut-commissariat du Rwanda à Ottawa, Supreme Court in Kigali.

Les tentatives faites pour joindre des universitaires des établissements d’enseignement suivants ont été infructueuses : Faculty of Law, University of Cambridge; Justice and Violence Research Centre, University of Sussex; Political Science and African Studies, Vassar College.

Sites Internet, y compris : Amnesty International; Avocats sans frontières; Bibliothèque de l’Université d’Ottawa; Bibliothèque publique d’Ottawa; Commission nationale des droits de la personne; Consultancy Africa Intelligence; ecoi.net; e­International Relations; États-Unis – Central Intelligence Agency, Department of State; Europa World Plus; Factiva; Faculty of Law, University of Cambridge; Fédération internationale des ligues des droits de l’homme; Freedom House; Hirondelle News; The Huffington Post; Hunt Alternatives Fund; Ibuka; Inkiko-Gacaca; Institute for Security Studies; Institute for War and Peace Reporting; Jane’s Intelligence Review; Lawyers Without Borders; Ligue des droits de la personne dans la région des Grand Lacs; Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l’homme; Minority Rights Group International; Montreal Institute for Genocide and Human Rights Studies, Concordia University; National Centre for Peace and Conflict Studies, University of Otago, New Zealand; Nations Unies – Haut ­Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, ONU Femmes, Programme des Nations Unies pour le développement, Refworld, Réseaux d’information régionaux intégrés; New Internationalist Magazine; Penal Reform International; Political Handbook of the World; Reporters sans frontières; Rwanda – Embassy of Rwanda in Washington, DC, Legal Information Portal, National Commission for the Fight Against Genocide, National Public Prosecution Authority, Office of the Ombudsman, Permanent Mission of Rwanda to the UN, Rwanda High Commission in Ottawa; School of Oriental and African Studies, University of London.



​​​